dimanche 11 juin 2006

Ravel Bartok (Théâtre du Châtelet - 10 Juin 2006)

Maurice Ravel - Daphnis et Chloé

Le livret, généreux, indique avec moult détails la création de cette oeuvre, destinée aux Ballets Russes, sur un argument tiré d'un roman qui "n'agence, d'ailleurs assez mal, que des péripéties dénuées d'intérêt". Ravel sort les gros moyens : grand orchestre, grand choeur, ils ne sont pas 1000 sur scène, mais occupent quand même l'espace de façon impressionnante. Il en faudrait plus pour faire frémir Pierre Boulez, qui, prenant en main l'Orchestre de Paris et son Choeur, permet à cette musique de se déployer avec tout le panache nécessaire. La magie Ravel n'opère qu'en concert, où l'orchestre pétille de délices sonores, mélanges voluptueux, soli irisés, nourriture riche, qui mal maîtrisée peut écoeurer ; il faut faire très attention à la dose de sucre et à la consistance de la chantilly. Ce soir, aucun problème : les pupitres sont sans failles, et les vents en particulier s'illustrent à maintes reprises ; le lever de jour peuplé d'oiseaux est messiaenique au possible. Applaudissements nourris en forme de triomphe, puis buvette prise d'assaut ; une dame-vison en tenue été me grille avec l'aplomb irrévocable de celle qui devra fouiller entre les billets de 500 pour trouver une plus petite coupure, tout en dialoguant avec des amis en plusieurs langues simultanées.

Bela Bartok - Le Château de Barbe-bleue

Partition rare, dit Paris-Broadway, quoique donnée il y a deux ans, avec le même Peter Fried, qui m'avait peu plu à coté de Ildiko Komlosi. Cette fois, sa partenaire est Jessye Norman, impeccable en diva, parure magnifique, poses et effets garantis, mais diction peu convaincante, et caractérisations émotives peu claires (mais ConcertoNet a apprécié). Bref, je n'ai pas encore trouvé mon couple parfait, pour cette pièce qui doit être bien complexe à interpréter (à certains moments, Peter Fried ne chante plus, psalmodie presque). Mais le héros du jour, c'est encore l'orchestre dirigé par Boulez. Il ne ménage à aucun moments les chanteurs, et donne toute la puissance, quitte à les noyer. Les cordes en particulier sont remarquables de précision, dans des petits moteurs rythmiques ou des nappes glacées. Cette oeuvre continue d'être ma préférée chez Bartok. Ce soir, on a eu droit, par le récitant Frigyes Funtek, à l'introduction parlée mise en garde : ce conte parle-t-il de dedans ou de dehors ?

Mise à jour : Dans le Pot-Pourri, des extraits des deux oeuvres de ce soir. La jointure des deux sélections est curieusement impeccable.

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