lundi 19 décembre 2005

Esprit de Noël

Thé , Mythe ou Réalité ?
L'occasion, avant de partir en vacances (retour en Janvier), de mettre un peu de musique joyeuse dans le Pot-Pourri.

Maj : ouais, Mariage Frères produisent les meilleurs thés, mais leur boutique en Flash s'encombre d'identifiants de session qui empèchent bêtement le référencement direct des produits. Donc, "Esprit de Noël", c'est leur thé T921, à la cannelle et "aux épices festives de Noêl", comme ils disent sur le paquet, et c'est ce que nous buvons cette semaine-là dans notre grand rassemblement familial. J'ai changé le lien.

samedi 17 décembre 2005

Tremplin Ensemble InterContemporain (Centre Pompidou - 16 Décembre 2005)

De jeunes compositeurs, nés en 1976, 1975 ou 1973, et un ainé pour terminer la soirée.

Hèctor Parra - Chamber Symphony - Quasikristall

Après un début plutôt varésien (musique en éclats, aigus et graves, faux chaos), une structure complexe se met en place, où chaque instrument navigue à son propre rythme, en un agencement de couches de temps qui se répondent, et parfois se synchronisent, dans des points d'unisson ou de silence. L'accompagnement électronique est admirable, qui agit en prolongement, et sonne véritablement naturel, et non artificiellement apposé comme souvent. Mais parvenir à cette virtuosité d'écriture a peut-être amené à abandonner en cours de route l'étincelle de beauté ou la part d'âme qui aurait donné vie à cet exercice splendide mais un peu vide.

Raphaël Cendo - Masse-Métal

Le projet consiste à s'approcher d'un son électronique saturé, mais uniquement par des solutions instrumentales. De fait, ça fait du bruit ; héritage Scelci Xenakis disons. Chaque interprète doit par moments frapper une mini-cymbale, ou souffler dans un chalumeau, en plus de son instrument normal ; le piano est joué dans la caisse, avec des mailloches ; etc. Mais ce bruit "gris", Cendo le varie en textures, densités et couleurs, et crée des tensions, des énergies, génère des émotions, presque des histoires. C'est brutal, primitif, pas raffiné, mais ça parle et ça gicle. La fin, où la clarinette basse hurle à l'agonie, terrassée par la meute orchestrale qui martèle sa mise à mort, est terrible.

Eivind Buene - Possible Cities

Quatre parties, jouées sans interruption, proposent des climats variés. Des mélodies post-sérielles, des process bien bâtis mais un rien trop évidents, des rythmes compréhensibles mais manquant de mystère, tout ça est très propre, trop. L'instrumentation surtout manque de fantaisie, d'imagination. Les neuf instruments sont cantonnés à leurs domaines habituels et banals. Du coup, pas de surprises, et du coup, pas de charme.

Magnus Lindberg - UR

C'est un classique, maintenant. En concert, la dépense d'énergie est bien sur plus visible que sur CD. Le trio à cordes se déchaîne, survolté et frénétique. Le clarinettiste Jérôme Comte s'agite et ondoie comme un joueur de Jazz Free. Dimitri Vassilakis, par contre, impérial et imperturbable, lance discrètement sur un clavier midi les séquences électroniques (qui, comme beaucoup, ont vieilli ...), puis se lance dans des cavalcades pianistiques avant de remettre en place les poignets de sa chemise.

Mise à jour : J'ajoute dans le Pot-Pourri un peu de musique contemporaine "de jeunes"... Difficile de trouver des compositeurs pas encore trentenaires déjà publiés en CD, du coup je me rattrape avec des quadras, quasi ou pas (respectivement, 1966, 1967, 1964, 1971 et 1961) ; parce que c'est très bien, les quadras.
Et je termine par "UR".

jeudi 15 décembre 2005

Orgie Bach sur BBC3

Certainement inspirée par les multiples radios Bach de Philippe[s], la radio BBC3 entame pour Noël et dès demain un marathon Bach, qu'on peut écouter en flux.

Via Alex Ross, qui nous rappelle les origines et les précédents.

dimanche 11 décembre 2005

Rainbow Symphony Orchestra - Fauré Schumann Borodine (Espace des Blancs-Manteaux - 11 Décembre 2005)

Entre les discussions avec le violoniste annonciateur, et les pauses au buffet "tout à un euro" (même prix que l'an dernier donc, sauf pour, nouveauté, le champaaagne), il y eut de la musique.

Robert Schumann - Symphonie n°4

Premier mouvement dense et énergétique comme du Beethoven (le livret, didactique et bien écrit, me souffle : sa quatrième symphonie ; sans doute, sans doute ...), deuxième qui me traverse sans que je n'en entende rien, troisième dont le scherzo m'est bien connu (j'aime ces concerts du RSO aussi pour ça : la découverte de connaissances ignorées ("unknown knowns" aurait dit le poète), de thèmes classiques qui vivent dans ma mémoire sans que j'en ai conscience), quatrième pris un peu vite, mais gonflé d'énergie et de majesté. Légères impressions de flottements dans les deux derniers mouvements, mais il faut aussi s'habituer à l'accoustique disons spartiate de la salle.

Gabriel Fauré - Pavane

Pizzicati puis nappes des violons, interventions délicates des cuivres et des bois, dans un style qui rappelle la pavane de Ravel, une restriction des effets et une exigence de tenue qui bride à bon escient toute tentative de sentimentalisme trop dégoulinant : l'orchestre s'en tire très bien ! C'est aussi l'occasion de me rendre compte qu'il faudrait que j'achète un peu de Fauré pour ma discothèque, c'est de la belle musique !

Alexandre Borodine - Danses Polovtsiennes

Encore des tubes ! C'est très agréable à écouter, plein d'entrain et de refrains entraînants, même si quelques heures à peine après, j'ai déjà tout oublié. Il faut dire qu'en bis, le chef John Dawkins propose "L'arlésienne" de Bizet, qui est très efficace pour laver le cerveau.

samedi 10 décembre 2005

Odile Duboc - Rien ne laisse présager de l'état de l'eau (Théâtre de la Ville - 9 Décembre 2005)

Comme seul élément de décor, une vaste plaque légèrement relevée dans un coin ; la lumière (de Françoise Michel, également associée, on peut deviner étroitement, à la scénographie) sera le moyen essentiel de varier l'aspect de la scène, ambiante ou concentrée, et essentiellement rouge.
Une dizaine de danseurs et danseuses commenceront par traverser aux pas de course cette zone, dans des arcs plus ou moins directs. Mais où est l'eau du titre ? Une citation de Francis Ponge dans le livret éclaire le projet : "Elle est blanche et brillante, informe et fraîche, passive et obstinée dans son seul vice : la pesanteur...". De fait, des chutes, il y en aura, multiples, molles, élastiques. Les corps sont comme en caoutchouc, s'abandonnant à la pesanteur, mais non vaincus par elle, rebondissants, se relevant toujours par vagues, et opposant une soudaine paradoxale résistance à la pression.
Par moments, tout s'arrête, les corps se figent dans des postures complexes et dignes ; parfois, les courants les dispersent violemment de tous cotés ; on notera aussi le passage répété d'animaux de fonds marins, marchant flottant dans des équilibres peu stables. Pas de spectaculaire, pas de provocation, une ouverture de l'imaginaire à partir des sensations.
Un spectacle qui semblait donc fort intéressant, mais dont je n'ai en fait profité qu'en petite partie ; la fatigue de la fin de semaine, conjuguée à la musique bruitiste et enveloppante de Thomas Jeker, me plonge dans un demi-sommeil, où les mouvements sur scène me semblent parvenir d'un rêve inhabituel.

vendredi 9 décembre 2005

Paris-Carnet 29 (La Passerelle - 7 Décembre 2005)

La liberté de circuler entre les tables me permit de papilloner de groupe en groupe. Ainsi discutai-je un brin avec Ron et Oli, Eolas et Versac, Pascal et Phersu, Guillermito, LeChapô et Bertrand Lemaire, Labosonic et Laurent Gloaguen ; souhaitai-je un bon anniversaire à la Dangereuse, fis-je une bise à Tarquine, échangeai-je quelques mots avec Kozlika, Mel'O'Dye et Lisbeï, saluai-je Sok, Palpatine et Tatou de loin. Qui d'autre ?
On me parla plus de mes radios que de mes billets, ce qui est cohérent avec les statistiques de fréquentations (rapport : 1 à 6 !), et cela me fît bien plaisir.
Aussi rentrai-je l'estomac lesté de deux bières et le coeur léger.

dimanche 4 décembre 2005

Dans la nuit - Louis Sclavis (Cité de la Musique - 3 Décembre 2005)

Dans le cycle "Musique/Cinéma", voici un film muet de 1929, unique long métrage de Charles Vanel, accompagné par la musique composée par Louis Sclavis et jouée en directe par lui et ses compagnons.

Le film "Dans la nuit" raconte un drame social et onirique : un ouvrier, quelques mois après s'être marié, subit un terrible accident de travail qui le défigure ; malgré le masque qui cache ses cicatrices, il révulse désormais sa femme, qui se jette dans les bras d'un autre ; entre mari et amant, qui se retrouvent tous deux portant le masque, l'un tuera l'autre, mais lequel ?
Ce film est étonnant, par son mélange de genres, entre l'évocation réaliste de l'usine, le lyrisme fiévreux du mariage et de la fête, puis le cauchemar de ce couple qui se fait horreur, les atmosphères de plus en plus nocturnes (le mari a du prendre un travail de nuit), et la fin (tout cela n'était qu'un rêve, qu'ils sont bêtes, les rêves !), qui serait un insupportable cliché aujourd'hui, mais en 1929 sans doute pas ; par ses détails insolites, une vieille à la fenêtre, une poule dans la cour, les enfants instigateurs de l'accident, puis dangereux témoins potentiels de la fuite ; par ses inventions formelles, le jeu thématique des masques (portés par des collègues farceurs lors de la nuit de noces, puis elle couvrant par jeu son visage d'une serviette), les positions des caméras parfois acrobatiques dans le manège ou la balançoire, les ombres et les lumières...

Pour accompagner le film, cinq musiciens :
- le plus discret, Vincent Courtois, au violoncelle joué à l'archet ;
- pour tenir le rythme, tout repose donc sur François Merville, aux percussions (pour les épisodes dans l'usine) et marimba (beaux interludes poétiques quand le film s'enfonce dans la nuit) ;
- à l'accordéon, Jean-Louis Matinier propose des plages presque abstraites, atones, statiques, mais plonge aussi dans les flonflons populaires quand il le faut ;
- au violon, Dominique Pifarély ose le tragique virtuose, le sentimental exacerbé, dans des envolées magnifiquement émouvantes ;
- enfin, Louis Sclavis, aux clarinettes et saxophone, navigue entre les divers climats, mélodies populaires, airs de fêtes, ou abstractions plus froides.

Film oblige, ils jouent dos au public, regardant l'écran, et sur partition, très écrite, pour coller aux épisodes. Musique très belle, à l'instrumentarium original, permettant de subtiles variations de couleurs. Musique intelligente aussi, qui met en valeur certains aspects du film, des coupures fines (entre aller à contre-courant d'une foule puis se laisser entraîner par elle ; entre s'étourdir de la fête puis s'y sentir mal), des rappels et des prévisions par le biais de leitmotievs (le masque, par exemple).

Mise à jour : Dans le Pot-Pourri, j'ajoute d'autres exemples de musiques réalisées récemment pour des films muets, le groupe "In The Nursery" qui y consacre sa collection "Optical Music Series", et le groupe "Cinematic Orchestra" pour un autre chef d'oeuvre de 1929, "L'homme à la caméra".

vendredi 2 décembre 2005

Win Vandekeybus - Puur (Théâtre de la Ville - 1 Décembre 2005)

Le décor est d'emblée plus simple que l'an dernier : une forêt de tiges entoure le plateau, un beau mur lépreux le clôt, un gros magnétophone à bandes et un banc l'ornent, et c'est tout. Cela laisse bien de la place aux danseurs ! Une première séquence mystérieuse donne le ton : les danseurs figés sur le pourtour de la piste s'effondrent soudain tous, rampent vers le centre constituer un tas de cadavres, puis se relèvent et se précipitent aux positions de départ ; le cycle répété de mort et de résurrection donne l'idée d'un défilement du temps anormal, inversé même ; la pièce sera morbide et spectaculaire. Mais parmi les autres pièces flamandes qui ont tant fait couler d'encre au dernier festival d'Avignon, Vandekeybus au moins sait manier la mesure, et s'arrêter quand il devient inutile d'aller plus loin.

On a donc une douzaine de danseurs, dans cet espace refuge, rescapés d'une catastrophe indéfinie. Ils courront en cercle souvent, on se croirait chez De Keersmaeker, mais dès que les corps se rapprochent, la violence athlétique de Vandekeybus reprend le dessus : hommes et femmes s'agrippent et se rejettent, se lancent comme des pantins, se balancent les uns les autres des lances (ça renoue avec les briques les oeufs ou les vêtements de spectacles précédents) dont quelques atterriront dans le public (dangereux, au Théâtre de la Ville, les premiers rangs...), joueront à des jeux cruels où les femmes ne seront pas les plus faibles.

Trois séquences vidéo permettent aux danseurs de se reposer un peu (quoique l'action continue pendant la projection), qui dans un défilement temporel heurté, créant une efficace impression de malaise, proche du cauchemar, évoque une assemblée de réfugiés dans un batîment, plein de bébés, d'enfants, d'adultes, de quelques cheffaillons et d'un ou deux illuminés ; le drame couve puis explose, suggestion de viol, de crimes, d'enfants massacrés ou abandonnés dans un désert glacé.

Quelques scènes particulièrement réussies :
- deux hommes dans l'incertitude finissent par tirer au sort qui est le père de l'autre ; mais c'est pour aussitôt se lancer les pires insultes que père et fils puissent s'échanger ;
- des séances de torture, où les victimes secouent les bourreaux, et tous confondus commencent à danser ensemble, danses primitives, appel aux énergies telluriques, aux rituels d'exorcisme, pour tenter de retrouver peut-être un peu d'humanité commune ;
- une femme à la cheville reliée aux autres par des cordes agitées follement, vibrionnante et mouvante figure ;
- le final, où tous de nouveau se frappent sauvagement, et se tuent les uns les autres, jusqu'au vieillard, père de tous, qui tue le dernier de ses fils, et se couvre le visage de poussière de pierre.

Musique adaptée, maîtrise du pathos, le spectacle est une réussite, même s'il est trop long ; deux heures, cela aurait mérité d'être élagué.

Xav de Panopticon a un autre avis. Autres articles (merci Technorati) : par Images de Danse, par Reverso.