samedi 20 décembre 2008

Dubugnon - Mahler (Salle Pleyel - 18 Décembre 2008)

Un billet rapide avant de continuer les valises...

Richard Dubugnon - Concerto pour violon

Une orchestration avec des échos style Dutilleux et une partie solo de violon virtuose qui me fait penser à du Schnittke, mais sans la poésie du premier ni l'ironie du second, le tout sonnant particulièrement artificiel, appliqué mais sans rien qui me touche. Janine Jansen se lance à corps perdu dans la partition, ça brille et ça fonce, avec des coups rythmiques fort marqués. Les touches d'originalité, comme les séquences d'imitation de funk, ou les coups de timbale pour imiter le passage des diapositives, sont ridicules. Bref, une pièce sans aucun intérêt, née obsolète.

Gustav Mahler - Des klagende Lied

Ici l'Orchestre de Paris sous la baguette d'Esa-Pekka Salonen se met à exceller. La première partie, fort sylvestre, n'est pas à la hauteur de Siegfried par exemple. Mais certains épisodes révèlent le talent du jeune Malher à 20 ans : des alliages splendides contrebasses et tubas, les interventions d'instruments en coulisse, etc. Plus que les quatre solistes, c'est le choeur de l'Orchestre de Paris qui m'offre le plus de plaisir, en particulier les parties féminines, lignes séraphiques au-dessus du tumulte sombre de l'orchestre.

Ailleurs : Palpatine, ConcertoNet

jeudi 11 décembre 2008

Dave Liebman - Sketches of Spain (Cité de la Musique - 10 Décembre 2008)

Bel hommage à l'album de Miles Davis et Gil Evans, avec l'élégance de ne pas sentir la naphtaline. Le trio Dave Liebman + Jean-Paul Celea + Wolfgang Reisinger se fait accompagner du guitariste Manu Codjia, et d'un orchestre au nom particulièrement glamour, "Orchestre du Conservatoire à rayonnement régional de Paris", réduit à ses cuivres, quelques bois, quelques percussions, et une harpe.
C'est d'ailleurs la harpiste, Delphine Latil, qui entame les hostilités, très librement ; et Manu Codjia je crois, qui introduit le thème si célèbre du "concerto Orange Juice", comme disait Pete Postlethwaite dans Brassed Off. Par rapport à la trompette de Miles, le saxophone soprano de Dave Liebman apparait moins incandescent, plus mélancolique, ce qui convient bien pour un hommage. L'orchestre dirigé par Jean-Charles Richard, également directeur artistique du projet, suit gentiment la partition. Caressant ses cymbales aux plumeaux, Wolfgang Reisinger semble s'ennuyer un peu.
Puis le Jazz s'offre une parenthèse. Solo teigneux et grondant, par moment percussif, du contrebassiste Jean-Paul Celea, accompagné par de longues notes aigües, étirées au pied par de multiples pédales, que Manu Codjia extirpe de sa guitare ; Dave Liebman les rejoint au bout d'un moment, de traits fulgurants ; la batterie vient et monte peu à peu en tension ; guitare et saxophone se densifient, un envol lent et assez prodigieux ; et soudain, l'orchestre se réveille, impose en force la grille harmonique de Rodrigo au quatuor, qui effectue une sorte d'atterrissage d'urgence impressionnant pour recoller au morceau de départ. Fin de la parenthèse. Il y en aura quelques autres.
Dans la soirée se côtoient deux matériels. D'un part, une retranscription assez fidèle du disque, même si le son orchestral n'est pas le même, et que les musiciens apportent leur couleur propre - par exemple, les accents chaleureusement sépharades de Liebman pour l'Amour Sorcier, avant des échos plus balkaniques un peu plus loin, sacrés voyages. Et d'autre part, des moments beaucoup plus directement de Jazz, solos, duos surtout, trios, où le talent des musiciens imposent le respect. Manu Codjia, comme d'habitude, par sa facilité aux dialogues fructueux, ses trouvailles sonores, sa volonté de recherche et de prise de risque, m'impressionne. Reisinger, quand enfin il en a l'opportunité, fait parler la poudre, belle énergie, tout en restant très propre, et jolis jeux avec un percussionniste (Arnaud Biscay ou Maxime Hoarau ?) qui saura l'accompagner tout au long du concert, avec relativement peu d'objets mais pas mal d'inventivité et un bon sens de l'adéquation.
Finalement, une très bonne soirée, qui étrangement, alors que j'avais l'impression d'une assez grande liberté dans les parties les plus Jazz, se termine pile poil à l'heure prévue - hasard ou construction beaucoup plus stricte qu'en apparence ? Un petit bis, qui n'est qu'une répétition - dommage, j'aurais aimé qu'ils concluent par un standard de "Porgy and Bess", par exemple...

mardi 9 décembre 2008

Boîte à images nostalgie

En l'absence de Monsieur KA, voilà que Cali Rézo se lance dans un quizz pictural ! Amusant de ne pas trouver les noms habituels dans les commentaires ... Mais les discussions foldingues de chez Samantdi vont manquer ...

lundi 8 décembre 2008

La moitié du chemin

A la manière de :
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La dernière livraison, avec des cantates du Premier de l'an particulièrement toniques et revigorantes, a permis au pèlerinage de franchir le cap des 100. Profitez-en !

dimanche 7 décembre 2008

Benjamin Carter Messiaen (Salle Pleyel - 5 Décembre 2008)

Elliott Carter - Three Occassions

3 pièces de circonstances :
- "Celebration of Some 100 x 150 Notes", pour la fondation de l'Etat du Texas, est une courte pièce triomphante et presque vociférante, avec beaucoup de cuivres et des cordes rapides, mais aussi une tension, et plusieurs climats successifs, plus complexes que le "carnaval sonore flamboyant et joyeux" indiqué par la brochure
- "Remembrance", dédiée au mécène Paul Fromm, est une élégie pour trombone, mais où j'apprécie particulièrement les longs accords orchestraux, somptueusement colorés (or, vermeil, nuances de pourpre ...)
- "Anniversary", enfin, est dédié à sa femme, pour leurs 50 ans de mariage ; différentes couches rythmiques - au-dessus d'une atmosphère grave et tendre, intime et profonde, rebondissent en interventions rapides trilles de cordes et de flutes mêlées - petites joies quotidiennes, quelques drames passagers, et le long fleuve tranquille de l'amour conjugal ...
C'est sans doute jusqu'ici ma pièce préférée de Carter !

George Benjamin - Duet

Concerto pour piano, avec un orchestre assez réduit, et en particulier sans violon. Pierre-Laurent Aimard donne un premier solo aux notes toutes accentuées, l'orchestre répond, contrebasse et harpe se la joue rythme jazzy, le piano s'adapte ; il restera cependant un peu maniériste dans ses accentuations quasi-constantes et assez artificielles, comme si appuyer chacune des notes les rendait plus importantes. Derrière, les paysages rythmiques de l'orchestre sont finalement plus intéressants.

Olivier Messiaen - Oiseaux exotiques

Bon, du Messiaen, bon, des oiseaux ... La beauté des instants, le haché du discours général d'un oiseau au suivant ... La richesse de l'orchestration, que ça pépie, roucoule, stridule, crie, siffle, vrombit, tintinnabule, etc ... L'aisance surnaturelle d'Aimard, qui navigue dans ces chants comme dans son pays natal, où toutes les difficultés sont niées, avalées, transfigurées, pour que ne reste que l'éclat des lignes superposées, la lumière des accords, la joie et l'équilibre ... L'orchestre Philharmonique de Radio-France, dirigé par Benjamin, n'est pas moins inspiré, il y a une attention palpable. Et peu à peu, tout ça se met en place, la volière se remplit par touches, pour former une grande fresque irradiante de vie, où l'ornithologie disparait un peu devant simplement la musique.

George Benjamin - Ringed by the Flat Horizon

"Je voulais faire le portrait d'une tension sinistre au moment où un paysage est envahi par une énorme tempête." dit Benjamin dans le livret. La tension est là, la tempête aussi, pourtant ce qui me frappe le plus, c'est l'aspect restreint du déchainement, une forme de désolation, quelque-chose qui suffoque, où l'air manque. De l'extrait fourni du poème inspirateur, "What the thunder said" extrait de "The Waste Land" de T. S. Eliot, je comprends que l'expression "Over endless plains, stumbling in cracked earth / Ringed by the flat horizon only" désigne un paysage si vaste que seul l'horizon le limite ; alors que j'y entends plus un horizon qui encercle, comme "un ciel bas et lourd [qui] pèse comme un couvercle". Ecrite à 20 ans, cette pièce est d'anthologie, quelque soit l'interprétation qu'on choisisse de lui donner. Elle met aussi l'orchestre à rude épreuve, les trompettes sont à leurs limites ...

Ailleurs : Palpatine, ConcertoNet

lundi 1 décembre 2008

Alarmel Valli - The Forgotten seed (Théâtre des Abbesses - 30 Novembre 2008)

Je me rends compte avec étonnement que je n'ai pas vu cette danseuse depuis l'ouverture de ce blogue ! Je l'ai pourtant déjà vu plusieurs fois, avant, mais ayant loupé son dernier passage en duo avec Madhavi Mugdal, cela remonte à loin.
D'où le plaisir des retrouvailles, avec certains gestes (certains communs à d'autres danses indiennes), les doigts qui se crochent au-dessus de la tête, la tête qui se déhanche au-dessus d'un corps immobile, les bras qui se lancent soit horizontalement dans une succession d'angles certainement particulièrement précis, soit verticalement dans une série de piqués vers le sol. Et des surprises, des inclinaisons du corps entier, des jetés de pieds façon danse paysanne, des jeux avec les pouces presque Bollywood. Et le plaisir habituel de la danse indienne, la succession des moments de danse pure, théorie des mouvements et des rythmes, et d'autres au mime particulièrement prononcé, soldat gisant au sol pleuré par sa mère, amoureuse timide se parant de jasmin, enfants plantant une graine et l'arrosant de miel ; le jeu intense du visage et du regard ; le langage codé façon langue des signes ; le soudain synchronisme exacerbé de la danseuse avec tel ou tel musicien.
Pour une revue de détail du programme, lisez Joël. Après l'exaltation de la pièce introductive, l'hymne à l'amour du Varnam, puis la lamentation sur les jeunes guerriers tombés au combat, finalement, la pièce qui donne son nom à la soirée, cette histoire de couple qui ne devrait pas s'ébattre sous l'arbre qu'ils ont planté enfants, me touche le moins, son discours écologique me passe complètement à coté. On termine par de la danse pure, mais sans jamais forcer façon démonstration technique - ce n'est pas le but d'Alarmel Valli, au style parfaitement maitrisé et intériorisé, ni sans doute dans les principes du bhârata natyam, où les mouvements, même très fortement codifiés, conservent une grande souplesse.