samedi 21 février 2015

Jazz à la Philharmonie (Philharmonie de Paris - 12 Février 2015)

Lorsque "Jazz at the Philarmonic" est né en 1944, l'idée était de donner plus de visibilité, mais aussi plus de respectabilité, à des musiciens de Jazz relégués habituellement dans des salles plus petites et enfumées. Le concept est-il applicable à notre époque ? J'ai des doutes ...
La troupe réunie ce soir autour d'Eric Légnini est impressionnante : Ambrose Akinmusire, Ernie Hammes (trompette), Stefano Di Battista (sax alto), Joe Lovano, Sophie Alour (sax ténor), Rocky Gresset (guitare électrique), Eric Legnini (piano, direction artistique), Thomas Bramerie (contrebasse), Franck Agulhon , Jeff Ballard (batterie).
Le choix des thèmes est très classique ("Walkin'", "In a sentimental mood", "Cherokee" ...), la structure des premiers morceaux aussi (chorus initial, puis chaque musicien prend un solo, chorus final). Par la suite, certains morceaux n'utiliseront qu'une sélection des membres du groupe. Mais on est loin des des orchestrations inventives de l'ONJ par exemple.
Dans tous ces solos, brillent particulièrement à mes oreilles Joe Lovano très sur de lui, Sophie Alour aventurière et preneuse de risque, et Ambrose Akinmusire toujours flamboyant.

Depuis le premier balcon, le son n'était pas sans reproche ; impeccable pour les saxophones et trompettes, mais bien plus brouillon pour la contrebasse et les batteries.

Au final, un concert loin d'être désagréable, et qui a peut-être permis à des néophytes de découvrir le Jazz dans de bonnes conditions, mais je préfère de plus grandes mises en danger, de l'orchestre et des spectateurs, dans des salles plus petites (et qui ne sont plus enfumées).

jazz à la philharmonie

Ailleurs : Franck BergerotJean-Pierre Goffin

EIC - Boulez Varèse (Philharmonie de Paris - 3 Février 2015)

Je découvre enfin cette philharmonie, dont j'avais eu juste un aperçu lors du weekend d'inauguration. Certains espaces sont très moches (entrée sans âme, plafonds de certains couloirs trop bas), et je crains qu'il ne devienne rapidement difficile de distinguer les imperfections dus au non-achèvement des travaux de ceux dus à l'usure du temps. La grande salle est plus attrayante, même si la finition y est aussi bâclée. Il faudra attendre l'ouverture de tous les espaces (bars, toit, ...) pour se prononcer plus définitivement.
Le public en tous cas se presse, salle bien pleine, pour un programme réunissant des compositeurs certes connus et reconnus, mais quand même aventureux. Curieux public qui applaudit entre les mouvements : sont-ils là attirés principalement par la salle ? Et du coup, reviendront-ils ? On verra bien dans les mois qui viennent ...

après la musique

Pierre Boulez - Pli selon Pli

De ma place, premier rang du deuxième balcon, la voix de Marisol Montalvo, que j'ai plusieurs fois adorée, ne me touche que par intermittence, l'équilibre sonore général privilégiant à outrance l'orchestre. Dommage, car elle plonge sans retenue et sans partition dans les lignes de plus en plus disloquées et incompréhensibles (de pair avec les textes choisis de plus en plus hermétiques). Pour l'orchestre, par contre, les détails abondent, dans une orchestration qui justement en fourmille : la déflagration sèche du départ, la suspension du temps par une cymbale ...
Dans les Improvisations, l'effet de loupe sonore que crée cette salle (qui joue malheureusement aussi pour les les menus incidents ayant lieu dans le public) fonctionne merveilleusement ; le charme de la poudre sonore (harpe, piano, guitare ... en mélodies de timbre) et des effets de percussion (suspensions des crotales et des cymbales ...) joue à fond.
Ces concerts où à l'EIC s'ajoute l'Orchestre du Conservatoire de Paris sont aussi une extraordinaire occasion pédagogique : les musiciens du conservatoire ne servent pas de faire-valoir à leurs aînés experts solistes, et assument avec brio certaines parties solistes bien périlleuses (aux flûtes par exemple). Partage des rôles décidé par les musiciens ou le chef d'orchestre Matthias Pintscher je ne sais.

Edgard Varèse - Amériques

J'ai encore l'impression de découvrir cette pièce pourtant déjà entendue plusieurs fois en concert ... Je dois faire un blocage ... Ce soir, j'ai longtemps l'impression d'entendre un remix du "Sacre du Printemps" avec des sirènes, ce qui de fait me bloque un peu ... Mais on peut apprécier la tenue de la salle devant la déferlante sonore et elle est admirable : aucune impression de saturation ou d'écrasement, même lors des déchaînements orchestraux les plus violents (le sacre à la Cité de la Musique était souvent limite).


la grande salle

AilleursFrançois Frémeau, Michèle Tosi ...
Le concert est disponible sur ArteConcert.

lundi 9 février 2015

Sonia Wieder-Atherton - Jacques Higelin (Cité de la Musique - 27 Janvier 2015)

Sur la scène de l'amphithéâtre, un tapis, un fauteuil, un tabouret, des lumières tamisées, l'ambiance est à l'intimité. Sonia Wieder-Atherton arrive d'un coté, Jacques Higelin de l'autre, elle allume une ampoule, il sort une liasse de texte, et ça commence.
La première partie présente des extraits d'une "Odyssée pour violoncelle et choeur imaginaire". Sur fond sonore marin (vagues et vent, marée et tempête) un peu trop présent, il récite un texte rempli de force océane, de naissance, de désir, de cycle de la vie ; elle joue diverses pièces plutôt modernes, souvent des arrangements personnels.
La suite sera plus ou moins du même tonneau, mais en se débarrassant de la bande enregistrée.
Jacques Higelin ne chante pas, à peine à un moment il chantonne, essentiellement il lit des textes, choisis parmi tout un recueil, semble-t-il par moments au hasard, dans lesquels il effectue des coupes et des redites, enivré par l'énergie des mots et des thèmes, enfance, vieillesse, nature, pulsions vitales ...
Sonia Wieder-Atherton joue du Britten, du Granados, du Janacek ... En fait peu importe, on se laisse emporter par son lyrisme très expressif, avec beaucoup de vibrato dans l'archet, beaucoup de chaleur.
Leur dialogue est tendrement réconfortant,  doucement émouvant.

higelin / wieder-atherton

Ailleurs : Bérénice Clerc
Spotify Jacques Higelin - Beau repaire Sonia Wieder-Atherton – Chants d'Est (sur le sentier recouvert)