Quatre éléments / Quatre saisons (Cité de la Musique - 7 Octobre 2008)
Voici un bien curieux spectacle, entre musique et chorégraphie. Si la première partie reste habituelle, la seconde beaucoup moins !
Jean-Féry Rebel - Les Eléments
La lumière descend lentement sur la salle pas vraiment pleine mais fort bruyante, alors que le luthiste est déjà sur scène à égrener des accords arpégés, tranquillement installé sur le corps ramassé du danseur et chorégraphe Juan Kruz Diaz de Garaio Esnaola. Puis l'ensemble de l'Akademie für Alte Musik Berlin s'installe, et la musique commence vraiment, mélange un peu hétéroclite de danses assez classiques, de duos parfois soutenus par un tiers, et de très surprenants intermèdes frôlant le chaos. Je pense qu'on aurait pu se passer de l'ajout de véritables chants d'oiseaux ou de bruits de vent, la musique était suffisamment évocatrice.Devant les musiciens, le danseur démarre allongé, reptations, contorsions, pas encore vraiment humain, se redresse lentement, mouvements hasardeux, retire la pierre qui lui déformait la bouche en grimace simiesque, apprivoise l'eau, découvre le feu, etc. Avec quelques accessoires, il crée des images qui renvoient à une préhistoire mythique, l'émergence de l'humanité, la prise de conscience issue de la confrontation avec les éléments. Mais c'est un peu trop convenu, trivial, ça frôle souvent le cliché, et manque un peu de poésie pour vraiment m'emballer. On reste dans l'illustration un brin anecdotique, loin de l'ambition dévinée de donner dans le transcendantal.
Antonio Vivaldi - Les Quatre Saisons
Deux grandes échelles sont amenées sur scène, sur lesquelles les nombreux violonistes et altistes de l'Akamus s'installent, une feuille d'arbre entre les dents. En effet, ce sont les musiciens qui vont danser maintenant ! Parfois simplement en utilisant des accessoires, comme se poser sur la tête un grand mouchoir blanc, ou une pomme en équilibre précaire ; parfois participant à des effets de mise en scène, comme les femmes essayant l'une après l'autre de réveiller d'un baiser le danseur tombé à terre après avoir croqué une pomme ; parfois devant jouer tout en courant d'un coté de l'autre, ou tournoyant sur des chaises à roulettes, ou imitant des danses savantes.Le premier rôle est tenu par la violoniste germano-japonaise Midori Seiler, secouée comme un arbre dans la tempête, renversée tête en bas comme une boule à neige, portée sur les épaules de Juan Kruz Diaz de Garaio Esnaola, avec qui elle forme un couple définitivement sexy.
Je ne vois guère d'autre pièce musicale du répertoire qui pourrait subir pareil traitement sans dommage ; les Quatre Saisons, c'est tellement connu par coeur, et tellement riche de détails pittoresques, que cette mise en scène revitalise, sans dénaturer. On a droit aux flèches tirées lors d'une partie de chasse (des archets fichés dans le dos de Midori Seiler), aux patineurs sur glace (violonistes en chaises à roulette), à la fuite sous la pluie, etc. ; mais pas au chien qui aboie.
C'est par moments très drôle, parfois poétique (et cette fois ça marche), presque tout du long surprenant, les pas de deux entre le danseur et la violoniste spectaculaires. L'Akamus semble beaucoup s'amuser (Midori Seiler elle tente de rester concentrée ce qui n'est pas évident au milieu de tous ces événements ...), et le public partage grandement ce plaisir. Un spectacle réjouissant, donc.
En attendant une hypothétique captation vidéo (sur Arte, ça aurait bien sa place ; et même un DVD, pourquoi pas ?), voici une présentation, en allemand, et avec une bande son décalée sur l'image, mais ça donne une idée des images proposées.
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