mardi 14 novembre 2006

Thomas Larcher (Bouffes du Nord - 13 Novembre 2006)

Olga Neuwirth - Incidendo/fluido

Voilà une façon originale de "préparer" un piano : non en y incorporant des objets de diverses natures, mais en utilisant un CD, qui diffuse dans la caisse des fréquences fixes, modifiant ainsi toute la structure de résonnance des cordes. Des morceaux de feutrine (entre autres ?) complètent le mécanisme, qui fait bouger de mystérieuse manière les sonorités. Une fois cela posé, la musique elle-même me semble un peu simpliste, des gestes, des bribes, des figures élémentaires, qui peinent à se réunir pour former un langage. Vers le milieu de la pièce (qui dure 13 minutes), une petite mélodie enfantine passe sur le CD, et de l'émotion apparaît, diffuse et inconstante. J'ai l'impression, un peu désagréable, d'être en fait passé à coté du morceau. Comme sa précédente oeuvre vue ne m'avait guère convaincu non plus, c'est Neuwirth que je peine à comprendre, il semble.

Arnold Schoenberg - Opus 11 et 19, Franz Schubert - D946 et D915

Une fois l'appareillage électronique débranché, Thomas Larcher attaque une série de pièce de ces deux compositeurs, sans pause d'applaudissements, comme une longue suite, qui étrangement fonctionne plutôt bien. De Schoenberg, on entendra les mouvements 1 et 3 de la pièce pour piano opus 11, qui serait, dixit le livret, la première pièce atonale (ici et maintenant du moins ; et je subodore des querelles d'experts à n'en pas finir sur un tel sujet). Larcher a tendance à sur-articuler chaque note, dans un souci presque obsessionnel de précision ; c'est plutôt crispant, mais heureusement réservé à cet opus. La pièce pour piano D946 n°2 de Schubert sera beaucoup plus naturellement fluide, avec une structure en refrain et couplets, d'une profonde mélancolie, une douce douleur par moments. Voilà que j'apprécie Schubert, surprise ! Il fallait bien commencer un jour ... De l'Allegretto en Do Mineur D915, je ne garde par contre aucun souvenir. Chassés peut-être par la révélation des Six Petites Pièces pour piano opus 19 de Schoenberg, des miniatures extraordinaires, comme du Webern sans série, des architectures ne reposant sur rien et pourtant d'une évidence indestructible. Larcher sort du voyage comme un peu effaré, et sous les couleurs somptueuses du théâtre des Bouffes du Nord, le paysage fut changeant, intriguant, passionnant, plutôt intense.

Thomas Larcher - Antennen ... Requiem für H.

Larcher est aussi compositeur, travaillant avec Wolfgang Mitterer. La pièce de ce soir consiste à disposer quelques objets sur les cordes du piano, et à les faire rouler, crisser, se balancer. Quand on compare avec les explorations de Sylvie Courvoisier, cela semble pauvre, contraint et même obosolète.

Fabien Lévy - Soliloque sur Olga, Arnold, Franz et Thomas

Le pianiste sorti, la salle quasiment plongée dans le noir, l'ordinateur prend le contrôle pour commenter ce concert mal compris de lui, comme dit le sous-titre. Il s'agit en fait d'un programme, disponible sur le site de Fabien Lévy (mais uniquement pour Mac, dommage, j'aurais aimé m'y essayer !), qui se nourrit de fragments d'autres oeuvres (en l'occurence, celles jouées ce soir), pour en extraire une partition purement électronique d'un petit quart d'heure. Déterminer la part due au programme lui-même, et celle venant des extraits, n'est guère possible lorsqu'on entend un seul soliloque ! Mais comme il en propose un sur son site (basé sur la Marseillaise), on peut constater que certains éléments se retrouvent : une division en globalement trois parties, d'abord une course-poursuite très rythmique d'objets sonores galopins galopants, puis une plage raréfiée avec de gros blocs de silences que des hordes insectoîdes viennent grignoter timides d'abord puis conquérantes, et enfin un épisode plus saturé en événements s'accumulant en mode quasi statique ; le final est aussi un peu semblable, avec une sorte de gros ronronnement terminé brutalement. Cela faisait longtemps que je n'avais pas entendu d'oeuvre acousmatique (souvenir de concerts de haut-parleurs à la maison de la radio, expérience fort agréable et enrichissante, surtout que ces concerts étaient (sont encore ?) gratuits). On se laisse porter par ces sons étranges où surgit ça et là un son de piano reconnaissable, une figure mélodique, un trépignement qui pourrait venir de Neuwirth, de Schubert, ou simplement du programme lui-même. Une originale manière de conclure un concert globalement assez atypique, même pour de l'IRCAM !

Radio

Je propose les fameuses six pièces de l'opus 19 de Schoenberg, puis le Soliloque sur le Marseillaise de Lévy.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Chez toi, oui ; parce que chez lui, non ...

Anonyme a dit…

mais si ! sur son blog pont des arts (encore un multiblogueur)