A la Cité, l'année commence avec du Jazz. Contrairement à la musique classique, où les programmes sont établis plusieurs années en avance, et plus encore en musique lyrique, le Jazz s'accompagne ... d'improvisation, et c'est souvent tardivement que les détails des soirées sont connus, ce qui n'empèche pas les groupes de changer de première partie ou de s'adjoindre des invités au dernier moment.
Bref, le Festival Jazz de de la Villette, du 30 Août au 10 Spetembre, sera consacré à John Coltrane, et même si quelques participants putatifs ne viendront pas, la fête restera prestigieuse, avec une pareille liste de noms : Ravi Coltrane, Alice Coltrane, McCoy Tyner, Reggie Workman, Pharaoh Sanders, Rashied Ali, Charles Gayle, Joe Lavano, David Murray, Dave Liebman (ah, enfin un nom que je connais pas...). A coté, entre autres, Magma, Louis Sclavis, DJ Shalom, Marc Ribot, Medeski Martin and Wood, et Anthony Braxton... Programme détaillé en Mai, miam...
Premier grand cycle : "La vie, la mort". Plein de requiems ! Je choisis l'Orphée version Jazz de Yves Robert, du Messiaen ("Et exspecto resurrectionem mortuari", par l'orchestre national de Lyon, leur carte de rattrapage par rapport à avant-hier), du Claude Vivier (compositeur québecquois mort assassiné à 35 ans, déjà entendu il y a quelques années à la Cité, un concert qui m'avait beaucoup marqué), du Mahler ("le Chant de la Terre", une fois de plus), et des oeuvres spectrales de Murail et Grisey. D'autres concerts me tentent, mais il faut maintenir un équilibre dans l'occupation des semaines. En Octobre/Novembre, d'autres spectacles du Festival d'Automne prendront place, et sans le temps de digérer, il y a du gachis.
Dans le cycle John Lennon, essentiellement consacré à des films et à des documentaires, une surprise : Bill Frisell, dans un trio Guitare / Violon / Guitare dobro (une version réduite d'Intercontinentals).
Début Novembre a lieu la 2ème biennale de quatuors à cordes, articulée autour des quatuors de Pascal Dusapin. Dans les 9 concerts programmés sur un seul Week-end, j'en choisis 2, un peu au hasard (euh.. Ferneyhough, "Adagissimo", ce n'est pas par hasard, finalement..).
Autour des folklores, le cycle "Cultures perdues / retrouvées" me permettra d'entendre du Bartok interprété par le "Budapest Festival Orchestra" (gage d'authenticité ?), et l'ensemble Umkulu, qui expérimentent autour du didgeridoo (ça peut donner n'importe quoi, mais faut bien essayer des trucs un peu surprenants de temps en temps...).
Autre curiosité en passant : "Dans la Nuit", film de Charles Vanel, accompagné musicalement par Louis Sclavis, et quelques compagnons. Je ne suis pas fan de ces films avec musique jouée live, l'objet final reste souvent trop hybride, et lors de musique contemporaine accompagnant un film muet, le décalage temporel est trop marqué. Bref, ça "marche" rarement. Mais là, avec du Jazz ? Faut voir !
La Cité propose souvent des "rencontres" entre un compositeur contemporain ou moderne et un ancien grand Maître. "Berio / Bach", "Beethoven / Stockhausen". Cette année, ils font très fort : "Lachenmann / Mozart". Sur, ça va grincer. Peu fan du Viennois perruqué, mon critère est simple : je prends les deux concerts où il y a le plus d'oeuvres de Lachenmann...
Nouveau cycle important : "Extase et trance". On commence avec les "Visions de l'amen", dont Zvezdo propose un très appétissant extrait dans sa radio ! Puis du Stockhausen sur des poésies amérindiennes et spatialisé, suivi des chanteurs harmoniques de David Hykes (ce disque est extraordianire). Plus des nuits qui peuvent être magiques : le 11/02, Terry Riley pour "In C", suivi d'un festival de musique indienne, et le 18/02, le même Terry Riley improvisant au piano, suivi de musiques electroniques plus ou moins expérimentales ! La dernière "nuit électronique" à la Cité m'ayant fortement déçu (le beat infiniment sclérosé, ce n'est plus de mon âge), je m'abstiens pour ce concert-là. Par contre, approfondir la musique indienne est un objectif à long terme, même si le lendemain, le 12/02, m'attendent Siegfried et Brünnhilde, Wotan et Hagen. "Schlafst du, Hagen, mein Sohn?". Un Crépuscule un peu pénible à suivre n'est pas à exclure.
"Le modèle classique" propose un gentil concert Monnet / Ligeti (le concerto pour piano) / Stravinski ("Pulcinella"). J'y prends aussi la dose annuelle de Bach, en motets allemands (une année sans concert Bach est une année gachée).
Le même cycle se conclut par un impressionnant dimanche, où Jean-Guihen Queyras interprète les six suites pour violoncelles de Bach, chacune accompagnée d'une oeuvre contemporaine commandée pour l'occasion : Ivan Fedele, Gilbert Amy, György Kurtag, Misato Mochizuki, Jonathan Harvey, Ichiro Nodaïra. Trois concerts successifs, un challenge invraisemblable ! Pour l'interprète, et peut-être aussi pour l'auditeur...
Du Jazz, de nouveau, sur le thème du métissage, mi Mars. Les quatre concerts de cette semaine sont passionnants : Art Ensemble of Chicago, Richard Galliano avec Gary Burton, Anouar Brahem dans sa formation "Le pas du chat noir", et le duo Dave Holland / Trilok Gurtu. Comment choisir ??? Finalement, j'élimine le Jazz Tango de Galliano (j'aime pas le Tango), et le duo final, parce que ma faible appréciation des solos de contrebasse risquerait de négativement contrebalancer mon amour des percussions.
Métissages toujours, du Steve Reich chorégraphié par Akram Khan, pour voir où il en est dans son parcours de chorégraphe en maturation, et un "événement scénique" de Philippe Manoury et Yannis Kokkos.
Retourner aux années cinquante par le biais des échanges Pierre Boulez / John Cage permettra de (re)découvrir des oeuvres de jeunesse, jeunesse des compositeurs, jeunesse de la musique qu'ils inventaient. "Cheap imitation" et "Dialogue de l'ombre double" seront chorégraphiés par Daniel Dobbels, que je ne connais absolument pas. Du piano préparé, et un "Marteau sans maître", concert indispensable. Et les "Notations" de Boulez, version piano, puis version orchestre (argh ! encore l'ON Lyon...).
L'année se termine par une visite du Japon. Après la découverte du Kabuki, j'essaie cette année le Bunraku. Et après que que les solistes EIC nous aient fait découvrir plein de compositeurs nippons, je terminerai cette année à la Cité par ... du Jazz, bien sur ! Le Big Band du conservatoire, dirigé au piano par Yosuke Yamashita.
Bon, une trentaine de concert, encore, cette année. Et j'ai du restreindre.
Stéphane Lissner avait marqué mes premières années parisiennes par sa programmation au Châtelet, Laurent Bayle marque les suivantes encore plus fortement par ses choix multi-horizons dans cette salle incontournable de la Cité.