Marc Ducret / Jean-Pierre Drouet (Atelier du Plateau - 5 Septembre 2005)
Près des Buttes Chaumont, au fond d'une courte et étroite allée, une salle atypique, petite, sans doute associative, sans estrade, où quelques rangées de chaises définissent l'espace de circulation des musiciens. Intimité maximale avec les artistes, distants de quelques dizaines de centimètres. A ma gauche, Marc Ducret, pantalon orange et crane rasé, armé de trois guitares, une acoustique qui servira à peine, et deux électriques, avec ou sans frettes, ainsi que d'une série de boîtes à effets, qu'il commandera de ses pieds nus. A ma droite, Jean-Pierre Drouet, micro scotché aux lunettes, derrière deux tréteaux de percussions diverses, cloches, appeaux, cymbales, ustensiles de cuisine...
Le départ est lancé par Drouet, qui soufflant dans une cloche puis saisissant ce qui lui tombe sous la main, commence une montée en charge caractéristique de sa manière, gérant le temps sur une vaste échelle, en flux et reflux d'énergie. Ducret accompagne de pizzicati plus ou moins saturés, d'ébauches de mélodies fondues à la pédale, de sonorités diversement bruitistes (peu de notes, en fait, de toute la soirée ; à la place, une exploration des utilisations parfois peu orthodoxes d'une guitare, comme jouer du morse avec le connecteur jack). Un système se met peu à peu en place, où chacun prend la main puis l'offre, passage parfois accepté parfois pas ; mais il me semble que Drouet est plus "structurant", et Ducret "décorateur" : en particulier, le changement de tréteau du percussionniste, passant de debout à assis devant une table mise sur écoute, qu'il frotte, frappe ou claque avec des cuillères à spaghettis, des moules à glace où des couteaux tout vibrants, marque une vraie rupture de climat, et le début de ma partie préférée, remplie d'images splendides, port nocturne hanté par le ressac où passent des oiseaux égarés, petit garçon sifflotant dans une forêt peuplée de bêtes grognantes, ou ce final, trop beau pour ne pas être préparé, où Ducret tapote un rythme sur les interrupteurs de sa guitare, tandis que Drouet, tout en maintenant un fond de wood-blocks aigus, se met à chantonner à la façon d'un chaman soufi.
Sur ce magnifique moment de poésie s'achève leur heure ininterrompue d'improvisation, qu'ils complètent en rappel de dix petites minutes. Une belle rencontre !
Mise à jour: J'ajoute dans le Pot-Pourri le seul morceau de ma discothèque où joue Jean-Pierre Drouet, qui est emblématique de la tendance "composition ouverte", un peu l'équivalent du Free en musique contemporaine ; puis un extrait de "Qui Parle ?", que je viens d'acheter à la Fnac, où le passage central ressemble un peu à ce concert ; et enfin, un extrait du Live de "Big Satan", dont il y a un autre morceau dans la Radio-Jazz.
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