vendredi 17 mai 2013

Messiaen et autres - En temps de guerre (Cité de la Musique - 13 Mai 2013)

Le sommet du concert, c'est bien sur le Quatuor pour la fin du Temps, en deuxième partie. Avant, on a droit à une série d'oeuvres écrites par des compositeurs français pendant la deuxième guerre mondiale, qui se révèlent toutes plutôt anecdotiques je trouve.

André Jolivet - Nocturne

Pour violoncelle, surtout, et piano, qui l'accompagne un peu à la façon d'un lied. La pièce fort romantique d'essence, est encore assombrie par la sonorité  un peu lourdement triste de Henri Demarquette.

Daniel-Lesur - Deux Noëls

Pour piano. Aucun souvenir.

Michel Portal - Comme un souvenir

Le livret indique juste le titre de cette oeuvre, "pour clarinette". Je la trouve fort peu structurée, jolie mais sans m'emporter. L'explication vient trop tard en début de deuxième partie : il s'agissait d'une improvisation à partir des souvenirs que Michel Portal (né en 1935) a des mélodies de cette enfance. L'avoir su préalablement aurait guidé mon écoute. C'est dommage.

Charles Koechlin - Les Chants de Kervéléan

Pour piano. Aucun souvenir.

Marcel Mihalovici - Sonate op. 50

Pour violon et violoncelle. Première occasion d'admirer le jeu d'Akiko Suwanai. La pièce n'est pas désagréable, mais là encore, une semaine plus tard (dans une période bien chargée en autres concerts certes), aucun souvenir.

Olivier Messiaen - Quatuor pour la fin du Temps

En préambule, François Henrot, fils d'un détenu du stalag où Messiaen écrivit la partition, raconte la création de l'oeuvre. Discours bref, qu'on sent maintes fois répété, comme calibré pour des sorties scolaires. Puis l'un des musiciens précise qu'il faudra s'abstenir d'applaudir entre les mouvements, malgré leurs sorties et retours. Et enfin la musique commence.
Et quelle musique ! Servie par quels musiciens !
Il y a l'entente fusionnelle entre le violoncelle de Henri Demarquette et le violon d'Akiko Suwanai (dans "la Liturgie de cristal", leurs tessitures se croisent, et c'est la que je prends conscience que c'est sans doute la première fois que je vois cette pièce en concert, tant il me semble en découvrir de détails et en redécouvrir des beautés), pourtant fort différents (Demarquette marquant plus l'émotion d'un vibrato très expressif ; Suwanai restant dans une pureté sonore presque froide, dans une parfaite lumière), mais leurs duos me bouleversent. Le livret précise que Michel Dalberto joue sur une piano C. Bechstein. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une simple clause publicitaire, mais bien le signe d'une rencontre entre un artiste et l'instrument qui lui permet au mieux de s'exprimer (comme Bojan Z et les Fazioli) : il en maîtrise les lents crescendos, qui virent presque au métallique par moments, et propose une vision bien en puissance de ces pages. Et finalement, celui qui m'emporte le moins, peut-être parce qu'il est trop libre par rapport aux interprétations dont j'ai l'habitude, c'est Michel Portal, dont "l'Abïme des Oiseaux" en particulier me déconcerte (pourtant les indications de Messiaen sont "lent, expressif et triste", c'était respecté - peut-être un son où il me manquait un peu de chair, je ne sais pas).

Même les passages les plus lents et longs qui en disque parfois me lassent, en particulier les deux louanges, "infiniment lent" et "extrêmement lent", passent comme des miracles de temps suspendu à l'intensité sublimée (au-delà, c'est du silence) ; quant aux passages furieux, Dalberto y met une énergie et une précision dévastatrices.

pour la fin du temps


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