Sylvie Courvoisier Mark Feldman Quartet (Sunset - 21 Novembre 2010)
Dans ce concert, ceux que je venais voir étaient les meneurs, Sylvie Courvoisier et Mark Feldman. Leurs acolytes a priori ne m'intéressaient guère. Erreur ! C'est un vrai quartet hors-normes, où tous ont un impressionnant background, et savent créer une musique sans guère de pareille.
Vu le savoir-faire classique du viloniste et de la pianiste, on se dit qu'ils n'ont pas vraiment besoin d'une paire rythmique pour leur indiquer le tempo. Et de fait, ils s'en abstiennent. Le batteur Gerry Hemingway, qui a longtemps joué dans le fabuleux Quartet d'Anthony braxton avec Dresser et Crispell, exerce plus ses talents de percussionniste, proposant une sorte de brouillard coloré de brisures de rythmes, un halo flottant et scintillant, qu'il densifie quand il faut jusqu'au martellement d'une impressionnante compacité.
A ses cotés, le contrebasse Thomas Morgan, que j'avais déjà dans les Five Elements de Steve Coleman, joue les tous-terrains. Par moments complétant et charpentant le flou incandescent du batteur, puis doublant note à note les lignes du violoniste, puis se lançant dans des solos vigoureux ou en corde raide.
C'est Feldman qui se présente face au public, annonce en français les morceaux, et généralement mène la barque le plus souvent. Son jeu est toujours mélodique, limite post-romantique, avec des envolées où les cordes aigües pleurent des plaintes déchirantes, avec quelques effets de jeu, avec souvent des lignes répétées au-dessus du flux mouvant de ses partenaires.
Quand à Courvoisier, la voir jouer est un plaisir à chaque instant renouvelé, tant elle jongle avec tous les jeux possibles du piano, énonçant une suite d'accords plaqués gentiment, quand soudain la main droite part papillonner dans les aigus pour un pépiement étourdissant de rapidité, ou bien la main gauche part dans les cordes graves pour des pizzicati grondants, puis elle se lève et joue dans la caisse avec de grosses billes qui créent un rythme auquel le batteur répondra à sa manière, et tout cela avec une assurance et un naturel qui donnent le sentiment que chacune de ses interventions est juste nécessaire et adéquate.
Les morceaux sont longs, remplis d'espaces d'improvisations, avec des retours, des façons de couplets entre des sortes de refrains, des départs, vers on ne sait trop où, on est entre musique classique de chambre d'avant-garde et free-jazz sans son coté facilement agressif.
Deux sets pas très longs, mais intenses en émotions, en surprises, en écoute et en dons. Un grand grand concert.
Ailleurs: Native Dancer
Spotify: Sylvie Courvoisier & Mark Feldman – Oblivia, Sylvie Courvoisier & Mark Feldman & Erik Friedlander – Abaton, Steve Coleman & Five Elements – Weaving Symbolics, Anthony Braxton & Gerry Hemingway – Old Dogs (2007)
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