Retour sur le diptyque 4.4
Il y a quelques semaines, Akynou choisissait pour son jeu du diptyque une de mes photos, à partir de laquelle les participants devaient rédiger un texte.
Il y a d'abord eu le plaisir d'être choisi, surtout qu'elle accompagnait cette sélection d'un texte de présentation flatteur, mais où je me reconnaissais à peu près (j'ai plutôt du mal avec les gens qui parlent de mes photos).
Lire les textes souvent très différents issus de la même image est toujours passionnant, dans ces diptyques. Cette fois-ci, cela l'était pour moi un peu plus encore !
De fait, le coté "effrayant" dont parlait Akynou est ressorti puissamment dans certains textes. Alors que je me m'amuse quand je prends des photos - je n'essaie jamais de témoigner, ou de dénoncer quoique ce soit. Le seul terme qui me conviendrait pour certaines photos aux contenus un peu durs, ce serait "exorciser" - j'ai par exemple pendant un stage à La Défense photographié toutes les caméras de sécurité sur le chemin entre la station de métro et mon lieu de travail, afin ensuite de pouvoir les regarder comme des éléments de composition graphique, avec lesquelles je pouvais m'amuser à créer des cadrages ou des oppositions, elles en avaient perdu tout caractère anxiogène.
Je prends donc souvent des photos pour m'approprier un lieu, pour en regarder les éléments comme du potentiel en terme de couleur de forme ou de texture, pour en scruter les métamorphoses sous le jeu des lumières ou des heures du jour et de la nuit, du sec et de l'humide. De fait, je photographie toujours un peu les mêmes endroits. Mais apparemment, cet aspect ludique, où je m'amuse d'un éclat particulier de soleil ou d'une ombre, de la peinture abimée d'un mur ou d'un reflet sur une vitrine, ne passe guère dans le résultat final. C'est pas grave, ce qui m'importe, ce ne sont pas les photographies produites, c'est le fait de photographier ; et le fait que photographier me permet d'établir avec le monde qui m'entoure un rapport plus riche, plus intense, plus attentif.
Je prends aussi des photos pour passer le temps, dans ces plages d'attente que nous offre souvent les transports en commun, ou avant un rendez-vous, ou le début d'un spectacle quelconque. C'est ce qui s'est passé pour cette photo, où j'attends le bus avec quelques plus ou moins collègues. Et contrairement à certaines interprétations, cela n'illustre pas la déshumanisation des rapports humains dans les entreprises capitalistes modernes. De fait, aux horaires habituels, ça papote pas mal, à cet arrêt, parce que ce sont toujours les mêmes qui s'y retrouvent. Mais ce jour-là, il me semble suite à une grève du RER B, je suis arrivé bien plus tard que d'habitude. Ce sont du coup des gens qui de fait ne se connaissent pas qui attendaient là, commerciaux en tournée de prospection, ou visiteurs occasionnels venus de province pour une réunion.
Enfin, le texte qui m'a le plus surpris est Point de vue de Marie Alster, qui a su exploiter une caractéristique de mes photos qui passe souvent inaperçue : la plupart d'entre elles sont prises avec l'appareil à hauteur de la hanche, et non des yeux. J'utilise en effet un compact avec écran inclinable, avec lequel je retrouve l'attitude d'un moyen format : appareil à hauteur des hanches ou de la poitrine, et regard penché vers l'écran (il faut s'incliner devant son sujet, disait je ne sais plus quel photographe illustre). Ca me donne plus de stabilité, et plus de discrétion. De fait, cette hauteur de regard, ce serait aussi celle de quelqu'un en fauteuil roulant. Depuis, j'ai du coup constaté la totale impossibilité de voyager en fauteuil dans cette gare (pas d'ascenseurs, des routes sans trottoir, des bus sans aucun dispositif spécifique prévu). Des travaux sont en cours, pour l'accès aux quais. Mais il faudrait renouveler complètement les bus, c'est pas pour demain ...
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