New-York (Cité de la Musique - 18 Juin 2004)
Conlon Nancarrow - Pièce n°2
Même quand il ne joue pas avec ses pianos mécaniques, Nancarrow s'intéresse quasiment exclusivement aux rythmes, qu'il superpose, confronte, ou distord avec maestria. Ici, le petit orchestre est divisé en blocs, qui chacun vit sur son propre tempo, la difficulté étant dans la coordination, qui impose une base rythmique de subdivision commune.
Malheureusement, les autres dimensions passent un peu à l'as : mélodies neutres, et surtout textures sonores sans imagination.
Dans le même genre, Charles Ives est infiniment plus intéressant, à la fois plus émouvant et plus radical. En abandonnant les rouleaux, avec lesquels il inventait la musique pour ordinateur sans ordinateur, Nancarrow s'est volontairement bridé, sans récolter de bénéfices tangibles. Dommage.
Ron Ford - Salomé Fast
Prenons, dans un opéra célèbre ("Salomé" de Richard Strauss), le livret. Réduisons-le à sa quintessence originelle (l'argument biblique). Donnons ce texte à une récitante experte en araméen, Naures Atto, une magnifique impératrice syriaque drapée de rouge. Entourons de musique fluide, nerveuse et mutante.
On obtient une pièce courte, forte, énergique, palpitante. Après un dense développement instrumental, la récitante déclame son texte avec une conviction et une théâtralité exemplaire. Sa voix se fait peu à peu trafiquer électroniquement, tandis que l'orchestre plonge dans un abîme sonore dominé par des percussions aux sonorités incongrues. Excellent.
John Zorn - For Your Eyes Only
Autant j'aime passionnément le travail de Zorn au sein de Masada, autant son coté "improvisation structurée" m'agace.
Cette pièce, écrite tout en regardant la télévision, zappe toute seule d'un climat à un autre, d'une évocation de tango à un clin d'oeil à Stravinsky, d'une fanfare de Jazz à un morceau atonal, sans jamais rester stable plus de 30 secondes. Ca peut être amusant un moment, mais l'absence totale de "discours" musical rend cette musique stérilement superficielle.
Cette inutilité est peut-être assumée, comme une critique du zapping culturel de la vie post-moderme, ou autre justification du même acabit bidon. Alors que l'oeuvre est juste ennuyante. Sans zapette à ma disposition, je me contente d'attendre que ça passe.
Steve Reich - Tehillim
C'est une pièce importante dans l'évolution de l'oeuvre de Reich : première fois qu'il met un texte en musique, utilisé aussi pour générer le rythme (de "Different Trains" à "The Cave", les enfants seront nombreux et fort vivaces). Il sort du minimalisme de "Come Out", même si la pièce reste dans le cadre de la musique répétitive !
Le chef d'orchestre, Peter Rundel, coupe la pièce en deux parties (alors qu'elle comporte 4 mouvements), d'une pause où un public étrangement inhabituel pour la Cité (d'où sortent ces ex Punks ?) essaie d'applaudir !
L'interprétation de l'EIC est bien évidemment impeccable (la simplicité de la partition permet à Desjardins de frôler la crise de rires !), celle des Synergy Vocals aussi. Mais pourquoi ces chanteuses passent-elles par les micros ? C'est un problème récurrent avec Reich, qui gâchent la beauté des voix par cet appareillage. Peut-être est-ce dù à l'utilisation dans son propre groupe, de voix au professionalisme insuffisant ? Ou est-ce un problème plus général avec l'équilibre sonore des pupitres ? Par exemple, les petites cymbales finales sont trop fortes. Sur disque, c'est aisément réparé. En concert par contre ...
Il est en fait tout à fait possible que Reich écrive plus pour le disque que pour la scène (sauf ses oeuvres multimédia ça va de soi)...
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