vendredi 4 juin 2004

Gielen - Kremer (Cité de la Musique - 3 Juin 2004)

Charles Ives - Central Park in the Dark + The Unanswered Question


Ces deux pièces jumelles sont jouées en suivant. Dans les deux cas, un tapis de cordes, stable, et un petit orchestre, dirigé indépendament, pour des épisodes variés.
Dans Central Park, les cordes jouent la nuit, l'orchestre joue toute une série d'événements bruyants qui viennent perturber la douce quiétude estivale du parc. Agréable, mais un peu superficiel.
La question sans réponse est d'un autre acabit. Les cordes jouent l'univers, la pure musique des sphères (superbe son du SWR Sinfonieorchester !), la trompette joue l'humanité qui pose encore et encore la même question de 5 notes ("qu"est-ce que la vie ?" j'imagine ce soir-là), et les vents sont les dieux, qui répondent de plus en plus énervés, des réponses de plus en plus complexes et incompréhensibles. Un vrai dialogue de sourds, surtout que la vraie réponse est dans l'harmonie éternelle des cordes. Une tragédie philosophique. L'interprétation est parfaite. Aidées par les réminiscences du film "La ligne rouge", les larmes me viennent aux yeux (alors même que dans le film, l'utilisation de cette musique m'avait énervé).

Dmitri Chostakovitch - Concerto n°1 pour violon


Des épisodes au lyrisme douloureux, rêveries remplies de désespoir accepté, comme un deuil depuis longtemps porté, et des danses villageoises, sauvages et ironiques, on est bien chez Chosta, cette oeuvre pourrait servir de résumé pour le caractère de sa musique.
Le violon est omniprésent. La dernière fois que j'ai vu Gidon Kremer, c'était dans le "Concerto Grosso n°5" de Schnittke. Depuis, il a plutôt salement vieilli, mais il danse toujours sur scène, et emporte le morceau par un allant, une rage joyeuse, une démonstration de virtuosité qui flirte avec les libertés (fausses notes dans les aigus ? est-ce si important, lorsque cela donne un coté "recherche de la blue note", renouant les cadences extraordinaires du concerto avec des improvisations Jazz).
En bis, et en solo, Gidon Kremer joue une "aurore" toute impressioniste (dont j'ai oublié l'auteur).

Béla Bartok - Musique pour cordes, percussion et célesta


On n'est pas au niveau de Fritz Reiner... Mon voisin le remarque fort justement : "Le début doit être pianissimo, ici il était seulement piano. C'est une interprétation trop rationnaliste." Tout à fait, Monsieur. Le premier mouvement doit être presque effrayant de tension, ici le climax est presque calme, trop soigneux dans les détails, pas assez halluciné. Je préfère les fausses notes de Kremer à cette perfection trop lisse.
Les autres mouvements sont mieux, avec un piano impeccable en percussions ou en glissandis, et quelques surprises scéniques : au cours du dernier mouvement, la joueuse de célesta doit se glisser périodiquement à coté du pianiste, pour y jouer à quatre mains. Dans l'espace encombré de la scène, elle s'acquitte de ce parcours avec une grace chaloupée très féline. Pour notre plaisir, elle se doit de recommencer lors du "bis" du Finale, joué d'ailleurs de manière plus détendue et du coup plus enlevé, donc plus réussi !

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