jeudi 4 juin 2009

Salia Sanou, Seydou Boro - Poussières de sang (Théâtre de la Ville - 2 Juin 2009)

Ce spectacle aurait-il pris de l'ampleur depuis sa préparation l'an dernier ? Initialement prévu aux Abbesses, il a été déplacé au TdV, du coup en placement libre. L'énervement habituel en ces occasions se calme assez vite lorsque s'élève la voix de Djata Melissa Ilebou, voix nue, fragile mais inébranlable, magnifique. Deux hommes en fond de scène courbent leur dos puissant, s'étreignent lentement, luttent et tombent. Relevés, un coup leur renvoie au sol ; parfois y suffira la voix de la chanteuse devenue parleuse, lancée dans une longue déclamation entre harangue et complainte, en kassena. Les corps seront souvent à terre, se tournant, rampant, se maculant de sable et de poussière. Il s'agit de s'arracher à cette terre. Quand péniblement ils y parviennent, une autre danseur ou danseuse les frappant les y renvoient. Des musiciens sur scène lancent des séquences de groupe plus marquées, où sur une épaisse et complexe couche rythmique parfois trouée de saxophone ou de voix, la troupe martèle le sol, toujours aussi présent.
Les épisodes ainsi se suivent, assez peu variés en définitive, mais où l'intensité physique (quels athlètes !) devient de plus en plus impressionnante. Tiens, pour une fois, je vais citer le livret, de Gérard Mayen, dont certains aiment à moquer le ton dit incompréhensible, mais que je trouve parfois fort précis derrière des formulations un brin tarabiscotées :
"La matière corporelle de la pièce est celle des postures effondrées de ces corps en flexions infinies, repliés, défaits. Le déploiement ou la déroute des verticalités sculpturales, la clarté rhétorique, incantatoire, des gestuelles, la retenue méditative des énergies, la scansion lancinante, déplorante, en sont la signature physique. A partir de chaque expérience individuelle de tension hiératique, d'empêchement de gestes inaboutis, de saccades convulsives - où peuvent se déceler des emprunts à des motifs traditionnels, réinterprétés - la propension cérémonieuse se résoud dans l'intensité obsessionnelle d'unissons, obstinés à questionner le sol."
Les musiciens, danseurs, et danseuses, tous noirs (à une exception près) burkinabés, reçoivent une ovation, prolongée, un peu exagérée.

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