lundi 1 octobre 2007

EMO - Boulez (Salle Pleyel - 30 Septembre 2007)

Cette fois, la salle est bien pleine, au point de désorganiser bizarrement le personnel d'accueil, légèrement dépassé par l'affluence ; comme il y a deux jours à la Cité, les voilà confrontés à une pénurie de programmes : nouvelle tendance, insufflée par des préoccupations écologiques ? simple mauvaise gestion des stocks, malheureusement, puisque de nouveaux paquets apparaitront après la pause ...
Le programme pourrait se comprendre ainsi : une pièce maitresse du XXème siècle, "Amériques" de Varèse ; 3 créations françaises de compositeurs inspirés plus ou moins directement par l'esthétique éruptive et percussive du maitre ; et du Boulez dirigeant Boulez pour (se) faire plaisir.

Mark Andre - ...auf... (II)

Andre ou André ? Le livret hésite, le CD dit é, l'IRCAM dit e, Zürich dit é, Darmstadt dit é et c ! Et que dit la musique ? Après le petit gag de Pierre Boulez retournant en coulisse chercher la partition, elle nait du silence, des claquements à vide des touches d'un piano, puis de deux, accompagnés de rares notes ; elle s'empare des cordes, le chuintement des archets, puis des vents. Les sonorités explorent les gammes bruitistes, mais sans chercher à copier Lachenmann, et proposent des moments véritablement inouïs, des alliages incompréhensibles, dont je ne parviens pas à comprendre la fabrication, au point que je cherche un moment où sont les hauts-parleurs ! Tout l'orchestre parfois semble le prolongement des percussions, ou sert de filtre, ou de caisse de résonance. Mais cette recherche d'inédit entre dans un vrai programme musical, une mise en tension de l'orchestre qui semble chercher à briser une frontière, une lutte parfois aride et parfois violente. Description d'un moment prodigieux, et passage en force à travers "quelque-chose" qui finit pulvérisé : cette pièce est le mouvement central d'un tryptique sur la résurrection du Christ. Et je pense avoir assisté à l'audition d'un chef d'œuvre.

Edgard Varèse - Amériques

J'ai l'impression d'entendre la pièce pour la première fois, alors que je suis supposé bien la connaitre en CD ! Mais après le petit dialogue charmant flute-hautbois, lorsque les percussions démarrent, sarabandes légères de castagnettes ou hurlements de sirènes, que les cuivres et les contrebasses rivalisent de violence, j'éprouve rapidement une sorte de rejet, trouvant presque pénible ce piétinement féroce et furieux, ce déchainement tellurique ininterrompu, ce maelström finalement assez peu varié. Bizarre sensation. J'avais préféré Arcana (dont le descriptif pourrait en large part être resservi ici !).

Enno Poppe - Obst

Quatre mouvements apposés comme des fruits sur un plateau : des lignes qui s'accumulent dans un vortex puissant ; un motif de tierce qui se ballade en descendant de pupitre en pupitre ; une brève étude rythmique peu intéressante ; enfin, mouvement le plus développé, de grandes vagues successives parcourant tout l'orchestre. Première oeuvre de Poppe pour grand orchestre, c'est peut-être une première familiarisation ; peu passionnant.

Matthias Pintscher - Towards Osiris

Comme première étape d'une future vaste partition (créée l'an prochain à Chicago par Boulez), c'est très prometteur ! Brillant et virtuose, avec un splendide solo de trompette tout à fait jazz, et des performances assez éblouissantes des claviers de percussion, c'est rapide, 7 minutes, mais intense.

Pierre Boulez - Notations I-IV VII

Après tant d'artisanat furieux, ces études pour piano développées pour orchestre sonnent de manière très classique ; seule la percussion indique leur modernité. Timbres moelleux, suaves par endroits, rythmes déchainés soudain, mise en place parfaite que le bis confirme, bonheur.
De bout en bout, bien sur, direction impeccable de précision, et orchestre (Ensemble Modern Orchestra, formé autour des 17 solistes de l'EM, specialisé dans la musique contemporaine) apte à toutes les alchimies sonores requises.

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