vendredi 17 décembre 2010

Fosse Chéreau - Rêve d'automne (Théâtre de la Ville - 15 Décembre 2010)

Le premier choc, c'est le décor, de Richard Peduzzi bien sur, si habituel complice de Chéreau, qui déborde presque sur les sièges (les rangées les plus basses ont du coup disparu) et sur l'entrée des spectateurs, qui doivent s'y faufiler : il s'agit de la transcription de quelques salles du Louvre (où ce spectacle a connu sa naissance), aux hauts murs rouges, ouverts de portes aux dimensions majestueuses, et aux hauteurs habitées de morceaux de tableaux.
Là arrive un homme, Pascal Grégory, être paumé qui s'allonge et s'endort ; puis une femme, Valeria Bruni-Tedeschi, qui voyant l'homme panique, puis l'approche et le réveille. Là intervient le deuxième choc, celui du texte. Mais celui-ci est plutôt négatif : rempli de répétitions sans qu'en naisse de la musique, de remarques philosophiques sans que s'en dégage du sens, il me semble creux, ennuyeux. Le long dialogue de la retrouvaille de ces deux-là me fait craindre le pire, s'il faut subir cela pendant presque deux heures ...
Mais heureusement viennent les rejoindre sur scène d'abord d'autres corps, au statut ambigu : sont-ce des fantômes, puisque cette rencontre se passe, pour ce qu'en dit le texte, dans un cimetière ? Des personnifications des souvenirs et des regrets ? Ou des personnages plus réels ? Selon les moments, on passera d'un de ces états à un autre, dans un flottement très beau, et qui lié au travail sur le corps, est une des principales forces de ce spectacle.
Lorsque débarquent les parents de l'homme (Bulle Ogier, à la bienveillance captatrice, et Bernard Verley, bloc de silence vieillissant) puis son ex-femme et son fils décédé, cela devient plus une comédie familiale, une peinture méchante des réunions de famille pas vraiment conviviales.
Dans le temps qui se bouscule, des années passant sans que cela soit dit et sans qu'on quitte ce lieu unique, les corps s'agrippent puis se fanent, la grand-mère déchausse avec une infinie délicatesse son fils tombé au sol, puis couvre d'un mouchoir les visages de tous ces hommes morts les uns après les autres, les femmes toutes debout se rejoignent, "il est l'heure d'y aller", dit la grand-mère jusqu'ici muette, et s'en vont vers les coulisses, magnifique final d'une pièce dont je n'ai pas du tout aimé le texte, mais sauvée en partie par la mise en scène de Patrice Chéreau, par le décor, par le travail sur les corps des comédiens.

Ailleurs: Luce, Trois coups

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