Compositeurs d'aujourd'hui : Michael Obst
Coïncidence amusante, Musicareaction a proposé il y a peu de temps un extrait d'oeuvre de ce compositeur il me semble peu connu, et que je crois ne jamais avoir entendu en concert. On notera aussi (c'est pas trop tôt !) l'amélioration du livret, qui présente les langues non plus en colonnes adjacentes, mais en pages successives, comme tout le monde, ce qui d'ailleurs leur permet d'ajouter une version allemande.
Kristallwelt III
La genèse de cette pièce est particulière, en ce que la partie instrumentale a été écrite en complément de la partie électronique initiale. Mais cela ne suffit pas pour produire de la musique originale. Sonorités de percussions chinoises, passages d'attentes suivis de déflagrations, une sorte de pointillisme ici, des coulures mordorées là, j'ai l'impression d'avoir déjà entendu tout ça ailleurs, et avec une intention plus marquée qu'ici, où ses éléments ne me semblent pas créer un tout bien consistant. Mais c'est une oeuvre de transition, entre les compositions purement éléctroacoustiques du début de sa carrière, et les pièces instrumentales où son langage saura devenir plus passionnément personnel. En ce sens, il est intéressant d'y déceler des échos prémonitoires des deux pièces suivantes.
Fresko
Michael Obst est également un émérite pianiste. Cette pièce est écrite à propos de Scriabine, plus précisément basée sur la sixième snotae (après la 9ème de Pesson, encore une coïncidence !). Après une introduction un peu placide (dont le reflet servira de conclusion), soudain se révèle avec "Gegensätze" et "Bewegung" une écriture passionnante ! C'est le rapport au déroulement du temps qui me surprend le plus : une sorte de stase, une musique non pas statique (le mot est trop connoté, et serait de plus incorrect), mais immobile, ou plutôt qui fait du surplace quoique gigotant beaucoup : beaucoup de micro-boucles, des répétitions nerveuses, des reprises et des passages d'un instrument à un autre, des à-coups, des hoquets, mais avec un grand soin de couleurs, et des moments solistes fondus dans la trame (dont de très beaux passages à la harpe). En intermèdes, des études de couleurs, "vert-magenta", et "gris-jaune avec du blanc", bien loin de Messiaen pourtant. Il me faut lire la notice pour comprendre qu'il n'y a là que 5 instruments : clarinette, trombone, violoncelle, harpe et piano : cela suffit, sans aucune part d'électronique, à créer tout un univers musical !
Nachtstücke
Ici il y a un peu plus de monde (8 musiciens), et de l'électronique. On retrouve ce temps immobile mais fluctuant, dans un climat, comme indique le titre, nocturne ; comme il est difficile, réveillé dans le noir, de savoir l'heure, où la durée d'un éveil, le temps ici semble bizarrement englué, porteur d'une tension, sans direction claire. En intermèdes, cette fois, des solos, qui révèlent l'intérêt de Obst pour le Jazz : contrebasse, flûte, congas. Ce sont comme des respirations au sein de la structure de l'ensemble, qui dès qu'il reprend la main remet en place le suspens étrange, des alarmes étouffées, des appels résonnants, des nappes synthétiques fantomatiques, des émancipations qui se brisent sur un rythme ou sur une note, des démarrages qui patinent et bouclent à leur tour, des frémissements haletants ou vaguement suffocants, toute une ambiance que j'aime énormément.
1 commentaire:
Merci pour cette découverte (chaque semaine je découvre soit un altiste soit un compositeur).
Dans un genre à peine différent, le Nachtstück m'a fait un peu penser à la B.O. de Bioshock (Garry Schyman):
http://www.tracksounds.com/audio/bioshock3.mp3
Horreur ! me direz-vous, c'est de la musique de film ! Non c'es pire c'est de la musique pour jeu vidéo.
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