Arnold Schönberg - Gurre-Lieder (Salle Pleyel - 25 Juin 2011)
Dernier concert programmé de l'année - et pas des moindres ! L'effectif orchestral démesuré impressionne (11 contrebasses d'un coté, 4 harpes de l'autre, 25 cuivres et 25 bois, etc.). Mais Marc Albrecht garde bien le contrôle sur la puissance de son orchestre philarmonique de Strasbourg, qui jamais ne saturera la salle Pleyel. La partition de Schoenberg y est aussi pour beaucoup, qui utilise cette profusion d'instrumentistes pour varier les effets et les textures, dans une extension du grand style wagnérien. Cette influence est particulièrement manifeste dans la première partie, grand duo d'amour entre le roi Waldemar et sa jeune maitresse Tove. Les deuxièmes et troisièmes parties accélèrent les ruptures de ton, accentuent le tragique, le lugubre, ajoutent du grotesque, des choeurs, et du parlé-chanté.
Il est difficile d'apprécier la prestation de l'orchestre, en absence de comparaison, pour une pièce qui n'est donnée que tous les 10 ans à Paris, et qui ne rend sur disque qu'une faible part de la splendeur largement déployée ici.
Coté voix, il y a du bon, et du moins bon. Le pire, c'est le parlé-chanté, avec voix très mal amplifiée, qui démarre métallique et irréelle, et qui va trop vite, Barbara Sukowa me donne l'impression d'un mauvais exercice de rap, qui me repousse très loin de toute émotion. Les deux voix principales, Ricarda Merbeth en Tove, remplaçante, et Lance Ryan, en Waldemar, sont passables, sans plus, souvent couverts par l'orchestre, et je n'aime pas le timbre de Ryan. Les seconds rôles sont bien meilleurs, Albert Dohmen en paysan effrayé, et Arnold Bezuyen en bouffon sardonique, des rôles à effets, où ils plongent avec gourmandise. Et enfin, le sublime est atteint par Anna Larsson, en colombe des bois, somptueuse, se jouant de la puissance orchestrale, une évidence et une émotion exceptionnelles.
Une longue ovation salue l'ensemble des protagonistes, Anna Larsson et Marc Albrecht en particulier, qui le méritent bien, pour cette pièce énorme, rare, et un peu orpheline, tant Schoenberg partira, pendant même son écriture, sur d'autres pistes, qui elles nourriront si profondément le siècle naissant (ça fait longtemps que je n'ai pas entendu le Pierrot Lunaire, tiens ...).
Dommage que le spectacle n'ait pas été enregistré, quand même (ni par Arte Live Web, ni par France Musiques !).
Ailleurs: Palpatine, Corley, Musica Sola (en attendant d'autres encore plus en retard que moi ...)
Spotify: Gurre-Lieder, en version B.B.C. Symphony Orchestra - Pierre Boulez, Wiener Philharmoniker - Claudio Abbado, ou historique 1953 Paris New Symphony Society - René Leibowitz.
3 commentaires:
bel opus ! jamais vu en live !
Ca ne m'étonne pas ! Corley dixit : "A Paris, il faut remonter à décembre 1998 salle Pleyel, pour l’avant-dernier concert de Marek Janowski avec le Philharmonique de Radio France, et, pour la précédente, sans doute au début des années 1980 avec Seiji Ozawa et le National au Théâtre des Champs-Elysées. Trois fois en trente ans, en fin de compte."
Vraiment rare, donc !
11 contrebasses ! c'est quand même top ! les orchestres mégotent souvent avec trois ou quatre... même pour des œuvres demandant de l'ampleur !
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