dimanche 16 juin 2024

Elodie Sicard, Bertrand Chamayou - Cage 2 (Studio de la Philharmonie de Paris - 4 Juin 2024)

Pour jouer des pièces pour piano préparés de John Cage, dont les noms ne sont pas indiqués dans le livret (qui cite juste le cycle "Sonates et interludes), ce que trouve fort regrettable, il y a sur scène quatre pianos, entre lesquelles se déplacent Bertrand Chamayou, ainsi que la préparatrice Anna Paolina Hasslacher. 

Et au milieu, il y a Elodie Sicard qui danse. Cela tient parfois au mime (je mesure un objet, je le porte dans mes bras), ou à la pantomime (je suis une enfant), parfois c'est plus abstrait. Sur une pièce qui martèle un rythme proche du Sacre du Printemps, elle se cache derrière ses cheveux comme une évocation de Sadako. Bref, sa danse est assez variée.

Tout est enchaîné. Les applaudissements ne retentiront qu'à la fin du spectacle, et ils seront nourris. Je suis moins enthousiaste, gêné par les manques du livret, par les sonorités peu différentiables des différentes préparations pour piano (tout sonne comme des gamelans, plus ou moins ...), et par des chorégraphies qui essaient de répondre à a la musique, au lieu de vivre pleinement à coté et d'apporter du coup plus de relief, comme le faisait le complice de John Cage Merce Cunningham. Un peu déçu.

cage 2

Ballet de l'Opéra national du Rhin - Spectres (Théâtre de la Ville - 25 Mai 2024)

Lucinda Childs - Songs from before

De hauts panneaux verticaux et coulissants en verre zébré divisent la profondeur de la scène en couloirs successifs, où se croisent des hommes et des femmes qui traversent le plateau, et parfois engagent un pas de deux. A partir de là, tout est affaire de variations : présence, absence, transparence partielle et superposition des panneaux, nombre de couples sur la scène, intensité et durée des pas de deux ... Et c'est un petit bijou, un plaisir constamment renouvelé. Ca m'a fait penser aux "Beach Birds" de Cunningham : une liberté très contrôlée mais qui donne l'impression d'un déroulé très naturel, fascinant et relaxant. (De la musique de Max Richter et surtout des textes de Haruki Murakami récités par Robert Wyatt, je n'ai par contre gardé aucun souvenir).

lucinda childs - songs from before

Bruno Bouché - Bless-Ainsi soit-il

Deux hommes, figurant Jacob et l'Ange, s'enlacent et s'agrippent, s'accrochent et se combattent. Un pianiste présent sur scène joue du Bach, caution chic. Sauf que tout ça me semble assez cliché et me laisse bien indifférent. 

 bruno bouché - bless-ainsi soit-il

William Forsythe - Enemy in the Figure

Un chef d’œuvre qui reste un chef d’œuvre. La musique, le décor, la lumière, la scénographie, et la danse qui surgit, explose, se cache, rebondit, tout est magique, exaltant et mystérieux. J'en vois ce soir des emprunts, ici à un échauffement de gymnastes, là à une troupe de danse en répétition, et je lis ailleurs que certaines séquences sont en partie improvisées - peut-être parce que le niveau technique est tel qu'il faut rendre la partition accessible à des corps moins aiguisés. Tout est beau, polysémique et envoûtant ; cette corde qu'on agite sur le sol : ligne de vie, pulsion cardiaque, lien ? Je vois que chaque personnage a un nom (Betsy, Isabel, Thomas, Christopher ...) : faut-il trouver un sens à tout ça, une histoire, une signification derrière certains costumes particuliers ? Mais on est si vite happé, transporté, à scruter les ombres et savourer chaque mouvement, qu'un éventuel décodage devient impossible, et inutile.

william forsythe - enemy in the figure

Ailleurs : Delphine Goater, Agnès Izrine ...