dimanche 11 décembre 2016

Wayne Shorter Quartet (Philharmonie de Paris - 29 Novembre 2016)

wayne shorter quartet


Wayne Shorter, Danilo Perez, John Patitucci et Brian Blade : quand ce quartet joue, le temps se fige. Ils s'installent sur scène sans un mot vers le public, jouent, pendant une bonne heure, puis repartent. Ce n'est pas du Be-Bop, ce n'est pas du Free Jazz, c'est leur musique à eux, qu'ils répètent depuis plus d'une décennie et demi, et c'est assez miraculeux. 
Je ne connais pas assez les morceaux pour les reconnaître, mais ne saurais même dire quand finit l'un et commence le suivant. Je n'ai plus l'impression d'écouter de la musique, mais de regarder un spectacle de la nature, un beau paysage sous les effets d'une météo agitée. Les phrases musicales surgissent, certaines sont reprises et développées, d'autres sont ignorées et retombent dans le silence ; les énergies fusent puis refluent ; des ambiances passent, comme un souffle, comme un marée, comme un orage qui menace, qui peut-être éclate, qui s'en va. 
Et quand c'est fini, je repars comme lavé de l'intérieur par une bonne dose de beauté inédite.

wayne shorter quartet

Andy Emler Megaoctet - Mystery Bag (Le Triton - 25 Novembre 2016)

Le Megaoctet d'Andy Emler est un habitué du Triton, et semble-t-il revient-il toujours avec de nouveaux morceaux. Et c'est bien le cas aujourd'hui, un paquet de nouvelles compositions qui permettent de remplir les deux heures (avec quelques titres plus auciens pour conclure). Assez simples, bien carrées, elles permettent aux solistes de se distinguer admirablement. Je me souviens en particulier d'un passionnant et fébrile dialogue entre Laurent Blondiau à la trompette et François Thuillier au tuba, d'une longue intro à l'archet de Claude Tchamitchian sur sa contrebasse, de longues dérives de Laurent Dehors au saxophone (un des morceaux lui est dédicacé). Eric Echampard à la batterie est toujours aussi précis et efficace, imperturbable et élégant, et il est ici accompagné de François Verly au marimba et percussions, excellent et énergique coloriste. De surprenantes couleurs surgissent parfois, de la juxtaposition par exemple du tuba et de la contrebasse. Et puis, il y a l'humeur sur scène, si agréable. De violents éclats de rire surgissent des coulisses pendant l'entracte, Andy Emler conjugue son talent de compositeur avec celui de chef de troupe, qu'il mène avec humour et bonhomie. Une excellente soirée.

Beethoven On Line (Cité de la Musique - 20 Novembre 2016)

Ludwig van Beethoven - Symphonie n° 7

Lorsque la principale impression suscitée par l'écoute d'une telle oeuvre est qu'elle se répète beaucoup, c'est que soit mon écoute, soit l'interprétation, n'était pas à la hauteur. Ou bien les deux.

Bernard Cavanna - Geek Bagatelles

Une application à télécharger sur son smartphone permet à une partie du public d'agir au cours de l'exécution de l'oeuvre : voilà pour l'aspect "geek", assez anecdotique ; la participation la plus effective sera quand le public devra crier, debout, "Freude ! Freude Freude !" comme un ralliement de guerre.
Quant aux bagatelles (le titre serait-il un nouveau clin d'oeil à Céline ?), elles sont bien lugubres. En hommage à sa mère récemment disparue, et en pensant aux destructions effectuées par Daech, Cavanna transforme la neuvième symphonie de Beethoven en un champ de ruines. La beauté hante les lieux, mais en lambeaux, en souvenirs, en bouffées perdues parmi des chants de désolations. A l'influence de Kagel, j'ajoute ce soir celle de Lachenmann.
Et le ludisme de l'application, le burlesque de ces "Freude" hurlés, ne sont que des paravents devant la tragédie. Une grande oeuvre, à qui Arie van Beek et l'Orchestre de Picardie (et le Choeur de smartphones des élèves du Lycée Boucher !) rendent honneur.

beethoven on line


dimanche 27 novembre 2016

Anne Paceo - Circles (Centquatre - 17 Novembre 2016)

Cela fait plusieurs mois que j'écoute régulièrement l'album "Circles" et c'est avec grand plaisir que je le redécouvre sur scène. Tous les morceaux de l'album y passent, bien sur, en versions plus punchy et plus longues. Anne Paceo est particulièrement imposante, alternant puissance et délicatesse, dans une joie de jouer toujours aussi communicative. Tony Paeleman assure l'ossature des morceaux, main gauche volubile pour la basse, main droite pour les textures et les couleurs (peu de solos en mode pianiste). Leïla Martial part dans tous les sens, ses aigus ébouriffent, son rap décoiffe, elle est magique et magnétique. Aux saxophones, Christophe Panzani remplace le très occupé Emile Parisien, ce qui fait un peu bizarre, les parties écrites étant bien sur les mêmes, mais les solos sont moins exubérants et pyrotechniques, l'architecture est un peu plus posée, et les envols plus retenus.
Pour compléter l'équipe, Pierre Perchaud vient ajouter le feu nocturne de sa guitare pendant quelques morceaux.
La fin du concert est particulièrement magnifique : l'émotion au fil du rasoir de "Birth and Rebirth", puis le tonique "Today", et enfin "Smile" (venu de Yokaï) - ces deux derniers titres liés, depuis certains "Banzzaï" de Nathalie Piolé, aux attentats du 13 Novembre, je ressors le cœur gonflé de sanglot tu et les oreilles pleines de beauté intacte.

2016/11/17 Anne Paceo Circles au 104

Spotify : Anne Paceo - Circles

Chassol, s t a r g a z e, Matmos - Réverbérations (Philharmonie de Paris - 13 Novembre 2016)

s t a r g a z e - Music for pieces of Wood

Stargaze est un collectif berlinois de musiciens "acoustiques"(cordes, vents, percussion) qui joue entre divers domaines musicaux, classiques, pop, ou électroniques. Leur interprétation de cette "musique pour morceaux de bois" commence joliment, avec même des mélodies, mais évolue de façon de plus en plus abstraite et rythmique, une sorte de retour progressif à l'austérité de la pièce d'origine. Je n'accroche pas du tout.

s t a r g a z e + Matmos - Emit Overcast Mesh

Le mécanisme se complique, avec les traitements électronique du duo Matmos. Le livret parle de contraintes et de durée variable en fonction des conditions de représentation. Ce que je ressens, c'est une structure en épisodes, qui se laisse écouter, mais qui ne me passionne guère.

s ta r g a z e + matmos

Chassol - Six pianos

Il y a une sorte d'évidence de vouloir s'amuser avec ce morceau en solo, multiplié par l'électronique. Et de fait, Chassol s'amuse bien, partant dans des bouts d'improvisation, parfois très techno, parfois proche du Jazz. Et les échos entre son jeu et la vidéo, où des mains arpègent en boucle sur des claviers, est assez bluffant. Très agréable.

chassol - six pianos

Chassol - Indiamore

La façon dont sont ici traitées les voix est sans aucun doute directement inspirée par Steve Reich, ce qui légitimise la présence de cette pièce dans cette soirée dédiée aux réverbération de l'oeuvre de Reich dans la musique de jeunes compositeurs non classiques.
Une vidéo diffuse des séquences filmées en Inde, une chanteuse sur la plage, un chauffeur de taxi, un cours de danse, un musicien de rue, qui bouclent de façon a créer une bande son rythmée, syncopée, sur laquelle Chassol, un batteur, et trois flûtistes, apportent leur couche supplémentaire. Le rendu final est du coup très composite.
Et pour ma part, je trouve que le mélange ne fonctionne pas. La batterie pilonne sans subtilité, et les flûtes sont presque inaudibles, non par leur niveau sonore mais par l'absence de définition de leur place dans le mix. Les parties jouées par Chassol sur la bande et en direct sont peu discernables. En fait, la contrainte de la vidéo est si forte que je ne vois pas du tout l'ajout apporté par les musiciens sur scène.
Du coup, je regarde l'écran, c'est joli, c'est intelligent ; mais sans plus.

chassol - indiamore

mardi 1 novembre 2016

Planning Novembre-Décembre 2016

Deuxième planning de suite que je publie avant le premier concert indiqué, je m'en félicite (car sinon, qui d'autre le fera ?).



Henri Dutilleux - Paysages poétiques (Philharmonie de Paris - 24 Octobre 2016)

Métaboles

Pascal Rophé dirige dans cette pièce emblématique l'Orchestre National des Pays de la Loire. Je note principalement une utilisation particulièrement accentuée de la dynamique dans les cordes, et l'ensemble des vents sonne très tonique.
Le problème, c'est qu'il y a aussi de la danse, interprétée par la troupe du Centre national de danse contemporaine, et chorégraphiée par Robert Swinston. Comme le note La Souris, Swinston semble vouloir imiter Cunningham, alors que la musique de Dutilleux n'est pas vraiment semblable à du Cage. La division musicale par épisodes d'ambiances très contrastées n'est absolument pas respectée, et en fait, il est difficile de faire le moindre lien entre la musique et la danse. Ce qui est curieux pour un hommage au compositeur.
De plus, le bonheur de "Beach Birds" par exemple, venait de la précision millimétrée des déplacements qui permettait l'apparition de figures géométriques au milieu du hasard des mouvements individuels. Ici, les danseurs peinent à se synchroniser, et les séquences, dès qu'elles sont répétées, souffrent de décalages. C'est très décevant.

Mystères de l'instant

La chorégraphie est plus intéressante, au moins elle semble vouloir transmettre de l'émotion. Dommage que cette musique ne me plaise pas vraiment (peut-être le même problème que pour "Jeux" de Debussy l'avant-veille).

L'Arbre des songes

Et on conclut par une nouvelle déception, la danse détournant, par le bruit des pas et des sauts, et par simplement sa présence visuelle, mon attention de la musique, sans qu'elle en vaille la peine ...

Bref, un ratage.

l'hommage à dutilleux

Ailleurs : Mimy La Souris

Hommage à Nijinski (Philharmonie de Paris - 22 Octobre 2016)

L'Après-midi d'un faune

Voici la chorégraphie la mieux conservée de Nijinski. Dominique Brun nous en propose une version assez aride, sans toile de fond, avec un rocher très symbolique, et à la stylisation très marquée. Mais ça fonctionne admirablement. Les gestuelles des nymphes, comme issues d'une antiquité fantasmée, où les bras sont cassés dans des angles bien peu académiques, le jeu anti-virtuose du faune, qui marche, s'arrête, ne bondit jamais, tout cela brille d'une modernité triomphante et pas du tout vieillie.
L'orchestre "Les siècles", dirigé par François-Xavier Roth, offre une version très correcte de la pièce de Debussy, sans trop insister sur la sensualité des timbres, puisque l'érotisme alangui correspondant de la danse est quasiment nié.

Jeux

Cette fois-ci, la chorégraphie a disparu, et il a fallu donc l'inventer presque totalement. Moi qui ne comprend pas grand-chose à ce morceau de Debussy (musique sans thème, qui s'oublie continuellement dans l'instant, et qui me laisse spectateur indifférent); ce n'est pas cette danse, où une demi-douzaine d'hommes et de femmes traversent le plateau parfois seuls et parfois en couple, qui me permettra de mieux l'apprécier.

Le Sacre du Printemps

Un long travail historique de croisement des documents liés à cette pièce essentielle permet d'avoir une bonne idée de la chorégraphie originelle, même si elle n'a pas été notée à l'époque. Décor, costumes, cette fois, tout y est. Le seul souci, c'est qu'il manque le parfum du scandale provoqué par la création. On en voit bien les raisons : les démarches voûtées, les pieds en dedans, les sauts qui renforcent le poids au lieu de suggérer l'envol, les choix sont radicaux.
Aujourd'hui, je me ravis de la musique, de sa puissance éruptive intacte, et de découvrir quelles articulations musicales sont liées à des événements scéniques (arrivée des vieillards, par exemple).
La danse elle-même, tant concurrencée par les centaines de versions proposées par des chorégraphes de toutes générations, n'est plus aussi essentielle; Et la mort de la danseuse sacrifiée, après un épisode de sauts que j'imaginais plus spectaculaires, m'a moins touché que, par exemple, chez Pina Bausch ...

le sacre

Ailleurs : Amélie Bertrand
Vidéo : On trouve désormais sur Youtube l'intégralité du passionnant document "Riot at the Rite" !

Sidi Larbi Cherkaoui - Puz/zle (Cité de la Musique - 21 Octobre 2016)

Le décor est ingénieux, formé de blocs superposables que les danseurs combinent de façons variées, escalier, mur, dominos géants, etc. La chorégraphie utilise ces assemblages architecturaux pour certainement raconter une histoire, mais celle-ci m'échappe complètement. Il faut avouer que je suis arrivé fatigué, et que la musique, essentiellement vocale, a fini de m'achever. Cela dit, en lisant, dans le livret, "quête philosophique", "élan profondément humaniste", "authentique épopée [..] du microscopique au macroscosmique, de l'individuel au collectif, du passé au futur", je crois que, même en forme, j'aurais eu bien du mal à absorber ce gloubi-boulga à l'ambition écrasante.

puz/zle

dimanche 30 octobre 2016

Autour de Chet (Philharmonie de Paris - 9 octobre 2016)

C'est l'option "grand spectacle"qui a été choisie pour cet hommage à Chet Baker : spectaculaires jeux de lumières, surprises ponctuant le déroulé, comme un chanteur qui vient du fond de la salle, ou un duo presque dans le noir, défilé plutôt prestigieux de chanteurs (Hugh Coltman, Piers Farcini, José James) chanteuses (Sandra Nkaké, Camélia Jordana) et trompettistes (Airelle Besson, Erik Truffaz, Luca Aquino, Stéphane Belmondo), orchestrations variées (si je vois bien pourquoi ils invitent un quatuor à cordes, je comprends moins bien le choix de renforcer l'aspect rythmique de plusieurs morceaux, en doublant le batteur d'un percussionniste - ce n'est clairement pas ce qui me vient en tête de prime abord quand je pense à Chet Baker).
C'est du bon boulot. On ne s'ennuie pas, et si cela manque globalement de raffinement, il y a quand même de beaux moments. Je retiens principalement Airelle Besson (qui est la seule personne dont le solo a été applaudi pour lui-même !) et Camélia Jordana, qui invoque dans son chant les grandes divas du Jazz ("Camélia, elle l'a, ce je ne sais quoi", etc.).

autour de chet


Les Arts Florissants - Bach cantates (Cité de la Musique - 27 Septembre 2016)

Pour un concert de musique de chambre, je suis assez mal placé, tout au fond de la salle. J'ai de plus la sensation fort désagréable qu'un des violons joue faux ; du moins quelque-chose me gène dès qu'ils interviennent. Enfin, une des chanteuses a la voix à plusieurs reprises inaudible sous l'orchestre, et aucune des autres voix ne m'enchante particulièrement.
Du coup, je traverse le concert (cantate profane BWV 202 ; sonate pour deux violons (aïe !) BWV 1039 ; cantate sacrée BWV 55 ; suite BWV 1067 ; cantate du café BWV 211) sans grand plaisir. J'attendais le plus la dernière pièce, mais n'ai rien ressenti de comparable avec sa découverte en 2008.

les arts florissants

Louis Sclavis Quartet - Loin dans les terres (Le triton - 16 Septembre 2016)

La soirée avait bien mal commencée, par un repas au restaurant du Triton, d'habitude très agréable, et ce soir totalement gâché par un service déplorable, où le collègue a été agressé d'un coup de pied (involontaire) puis d'un coup de fourchette (très surprenant), et où il a fallu attendre près d'une heure qu'on nous serve des plats qui n'étaient pas ceux commandés. Arrivant quand même dans la salle, nous sommes encore refroidis par le discours inaugural du maître des lieux, expliquant qu'il couperait le courant si les musiciens dépassaient l'horaire de début du second concert (Louis Sclavis expliquera ensuite qu'il s'agissait d'une blague entre eux ...).
Le plaisir heureusement revient dès qu'ils commencent à jouer, et c'est un bon long set de plus d'une heure et demi qu'ils nous offrent.
Le batteur Christophe Lavergne et la contrebassiste Sarah Murcia se connaissent bien, évoluant dans le trio de Sylvain Cathala. Lui est toujours incisif et inventif. Elle est pour une fois un peu en retrait, solide mais sans ostentation. Ils laissent toute la place au pianiste Benjamin Moussay, lyrique et intense (le collègue trouve dans son jeu du Chick Corea - celui de "Now he Sings, Now he Sobs" par exemple), et au leader et clarinettiste Louis Sclavis, merveilleux et plus apaisé que parfois.
Au final, c'est de la musique que je déguste avec un grand plaisr sur le moment, mais sans ressentir le besoin pressant d'acheter le disque quand il paraîtra.

louis sclavis quartet - loin dans les terres louis sclavis quartet - loin dans les terres
louis sclavis quartet - loin dans les terres louis sclavis quartet - loin dans les terres

Ailleurs :Alain Gauthier

dimanche 9 octobre 2016

Emile Parisien Quartet / Archie Shepp All Star (Grande Halle de la Villette - 3 Septembre 2016)

Emile Parisien Quartet

La première fois que je les avais vus, ils avaient joué les morceaux de leur dernier album, dans l'ordre. Cette fois, plus conventionnellement, ils piochent plus largement dans leur discographie, et allongent encore des morceaux déjà longs au départ, construits en épisodes, avec des plages proches du chaos (Julien Touéry fouille dans son piano préparé, Ivan Gélugne martyrise se contrebasse en pizz sauvages, Julien Loutelier revisite sa batterie dans un grand désordre percussif) qui soudain passent du trépignement à l'envol, du surplace à la course, du sombre à l'embrasement. Ces séquences épiques sont généralement l'occasion de solos flamboyants d'Emile Parisien, dont tout le corps réagit à la musique, les jambes s'envolent et se tordent, le dos s'arc-boute puis se détend, les mains et la bouche s'agrippent au saxophone, ténor ou soprano, tandis que les notes fusent, phrases serrées, explosives, tournoyantes, escaladeuses de ciel et bâtisseuses de pont au-dessus des abîmes.
Comme ils ne sont que la première partie, le set est assez court, moins d'une heure. Dommage, je suis à peine rassasié.

émile parisien quartet

Archie Shepp All Star - Tribute to John Coltrane

En effet, quelques standards de Coltrane sont joués ("Naïma", "Cousin Mary" ...), mais Shepp y mêle ses propres succès ("Blasé", "Los Olvivados" ...) et d'autres. Il y a pas mal de monde sur scène : au centre, Archie Shepp ; juste autour, Billy Hart à la batterie, Richard Davis à la contrebasse (qui se déplace en fauteuil roulant et joue assis), et Jason Moran au piano ; plus loin, Ambrose Akinmusire à la trompette, et une section de cuivres (Sebastien Llado, Izidor Leitinger, Jean-Philippe Scali).
Le problème, c'est que j'ai du mal à apprécier le son d'Archie Shepp, qui est sa signature très particulière; Ça geint, ça chouine, ça larmoie, ça se tord et ça suffoque, et je souffre. Je reste du coup assez extérieur aux émotions suscitées, et observe le tout d'assez loin.
Dans les bons moments, je noterai : de beaux, simples et efficaces effets de big band entre la section de cuivres et la contrebasse, sur "Hambone" ; une version âpre et écorchée vive de "Naïma", très loin de toute mièvrerie ; la prestation impeccable de Marion Rampal sur "Blasé", troué de silence et d'obscurité magnifique ; et enfin, pendant le bis, enfin Akinmusire nous délivre un solo lumineux, généreux, comme libéré.

archie shepp all star

Ailleurs : JazzMagazine
Vidéos : Emile Parisien, Archie Shepp

mercredi 28 septembre 2016

ONJ 30 ans ! (Cité de la Musique - 2 Septembre 2016)

Berlin

En première partie, l'ONJ d'Olivier Benoît joue son hommage à "Berlin", dans un ordre différent de celui du disque (je me demande s'ils font pareil pour "Paris", qui ressemble plus à une suite de tableaux ordonnée). Connaissant l'album, je me repère mieux qu'à la première écoute dans ces longues plages de matière dense, plutôt sombre, traversées d'influences plus ou moins identifiables. La lumière vient des solos, où brillent particulièrement Fidel Fourneyron au trombone, Fabrice Martinez à la trompette, et Théo Ceccaldi au violon. La base rythmique n'est malheureusement pas à son niveau habituel : la basse électrique de Sylvain Daniel m'émeut bien moins que l'habituelle contrebasse de Bruno Chevillon, et le son de batterie d'Eric Echampard, toujours aussi furieusement pulsant d'énergie sous contrôle, manque de mordant (la qualité sonore de la vidéo est meilleure qu'en direct sur place !). Quoi d'autre ? Alexandra Grimal ponctue son solo de cris ; Sophie Agnel joue puissance et émotion avec des clusters ; la clarinette de Jean Dousteyssier, un peu noyée dans l'ensemble, gagnerait à être écoutée dans d'autres contextes.

30 ans !

Pour cet anniversaire, Arnaud Merlin joue le Monsieur Loyal, invitant tour à tour les 10 chefs d'orchestre successifs de l'ONJ, et discutant tranquillement avec chacun d'eux, le temps d'une anecdote ou d'une réflexion. Puis l'orchestre actuel, auquel se sont joints des élèves du CNSMDP, et deux invités venus d'Oslo, joue l'une des compositions du dit chef. Le rythme de la soirée est bon, tout le monde a l'air d'être heureux d'être là, sans trop de regrets ou de récriminations artistiques ou politiques. Quant aux morceaux, ça dépend ! Certains me plaisent beaucoup, d'autres pas du tout.
Du coté positif : "Desert City" d'Antoine Hervé, captivante intro en bruitisme subtil par Agnel et Ceccaldi, et atmosphères mystérieuses et capiteuses ;  la belle prestation d'Elise Caron pour "A plus tard" de Denis Badaut, voix, flûte, et effets sonores divers ; la douceur onirique de "Argentiera" de Paolo Damiani, avec solos mêlés de Ceccaldi et Grimal ; le duo oud (par Barthélemy) - trompette (par Martinez) sur "Oud-Oud" ; le grand plaisir d'entendre "Paris V" en fin de parcours, son énergie électrisante, et un formidable solo de Hugues Mayot.
Du coté négatif : "Real Politik" de Claude Barthélemy, un jazz-rock pompier, où sa prestation en guitar héro m'a passablement saoulé ; "Out of" de Didier Levallet, bien trop classique dans sa structure pour susciter l'intérêt (mais les trois solos sont pris par des élèves du CNSMDP, ce qui est une chouette décision).

onj 30 ans - les musiciens

Ailleurs : Citizen Jazz, JazzMagazine
Vidéos : Berlin, 30 ans !

dimanche 25 septembre 2016

Sarah Murcia / Magnetic Ensemble (Cabaret Sauvage - 1 Septembre 2016)

Sarah Murcia - Never Mind the Future

Le public est plutôt rare quand s'installent sur scène les musiciens, dans ce toujours aussi magnifique cabaret Sauvage, mais il grandit peu à peu, attiré par les chansons des Sex Pistols admirablement arrangées, de manière formidablement diversifiée, par Sarah Murcia (du rageur et très direct "God Save the Queen" au mystérieusement planant et presque Lynchien "Pretty Vacant", du guilleret "Liar" au puissant et entêtant "Submission"). Commençant à la basse électrique puis passant à la contrebasse, et parfois ajoutant le chant, elle délivre aussi de terribles solos, qu'elle vit intensément.
Le chant est principalement assuré par Mark Tompinks, très charismatique performeur. Frank Vaillant à la batterie et Julien Desprez à la guitare assurent les aspects les plus rock. Au piano, Benoit Delbecq est, comme d'habitude, à la fois profondément fidèle à lui-même, et constamment surprenant. Je retiens en particulier un duo piano/ batterie, tout en tension. Le plus étonnant dans cette équipe est peut-être la présence d'un saxophoniste, Olivier Py, instrument assez rare dans le Punk originel ...
Une des réussites de ce projet est de faire entendre les textes des Sex Pistols, souvent négligés, souvent peu compréhensibles aussi ; ici, ralentis, articulés, ils accrochent l'oreille ("No feelings", "Bodies" ...).
Comme les Sex Pistols faisaient de multiples doigts d'honneur à la musique "sérieuse", quand Sarah Murcia redonne des lettres de noblesse à leurs chansons, cela donne une forme d'hommage assez paradoxal !

sarah murcia - never mind the future

Magnetic Ensemble

Un groupe composé principalement de percussionnistes, plus un piano préparé tout aussi rythmique, un clavier pour la basse, et une chanteuse éthérée pour l'ambiance, cela devrait beaucoup me plaire, mais finalement, non. Je trouve les compositions sommaires, les constructions sonores peu accrocheuses, et le désintérêt me fait quitter la salle en milieu de set.

magnetic ensemble

mardi 30 août 2016

Planning Septembre-Octobre 2016

Oh, un planning de début d'année livré avant le début des festivités ? Profitez-en, c'est rare ...





jeudi 21 juillet 2016

Anne Teresa de Keersmaeker - La Nuit transfigurée (Théâtre de la Ville - 15 Juin 2016)

Au départ, un homme et une femme. Puis l'homme s'éloigne, et un autre le remplace. S'ensuit un long pas de deux, sur plateau nu, avec la musique de Schönberg en fond sonore. C'est un peu peu. Moins de cercles et de spirales que d'habitude, plus de diagonales. Rien de bien passionnant. Et comme cette musique me laisse toujours aussi peu intéressé, je m'ennuie tranquillement. Heureusement, pour une fois, c'est court (40 minutes, durée dictée par la pièce de Schönberg).

la nuit transfigurée

dimanche 17 juillet 2016

EIC - Temps réel (Cité de la Musique - 10 Juin 2016)

Aureliano Cattaneo - Corda

Le piano est augmenté par des capteurs midi et autres gadgets qui permettent de déformer les sons ou de lancer des séquences, elles-mêmes dérivées de sonorités pianistiques. Comme souvent, l'effet catalogue et démonstration guette. J'aime bien certains sons, comme une sorte de crotale mystérieux et inquiétant, ou le jeu sur les résonances graves.

Brian Ferneyhough - Inconjunctions

Il y a quatre parties aux caractères très différents, disposées autour d'un panneau central finalement beaucoup plus intéressant et original, où les musiciens jouent très doucement un entrelacs de lignes, pour un résultat à la fois statique, et mouvant sans aucune répétition.

Beat Furrer - linea dell'orizzonte

Le livret explique : "de l'imbrication des voix émerge une étude des effets d'ombre par distorsion". Je ne sais pas trop ce que cela signifie ... Cela n'empêche pas la musique d'être très prenante, nerveuse, pleine d'accents étranges, de sonorités disparates, contrastées ; des affrontements ont lieu en arrière-plan, il y a des clairs-obscurs pleins de tensions et de dangers, une vie s'agite frénétiquement dans les (sont-ce celles-ci ?) ombres.

Yan Maresz - Tutti

C'est indéniablement de la bonne musique bien efficace, avec des effets divers et variés, des séquences pour tous les goûts, et du travail bien foutu, mais ça ne me touche pas. J'écoute sans déplaisir, mais sans passion, et en oubliant au fur et à mesure.

Ailleurs : ResMusica

Airelle Besson Quartet (Café de la Danse - 8 Juin 2016)

Olivier Bogé, Tony Paeleman

Olivier Bogé nous explique que les morceaux joués ce soir sont destinés à un ensemble de musiciens bien plus conséquent. Pourtant, la plupart des morceaux tiennent fort bien, dans cette réduction en duo (l'un des derniers aurait sans doute supporté une lente montée en puissance, difficile à produire ainsi allégé). Olivier Bogé alterne entre guitare (instrument où je le préfère, de loin) et saxophone, Et Tony Paeleman se cantonne au piano, sans aucune électricité. Musique de voyage et de paysages, tranquille, bien réalisée, très agréable.

Airelle Besson Quartet

Le plateau est presque coupé en deux. A droite, les deux hommes. Benjamin Moussay aux claviers (je découvre que les lignes de basses ne sont pas jouées sur un pédalier d'orgue, mais sur un mini-clavier spécifique posé sur le piano) organise une bonne part de la musique. Fabrice Moreau reste un batteur d'une suprême élégance, qui même dans les courses haletantes joue de micro-décrochages, des décalages, des éclairages qui apportent surprise, fraîcheur, émotion. A gauche, les deux femmes. Isabel Sörling chante pieds nus, corps agité de longues extensions et frémissements, en accord avec sa voix envoûtante, et une main posée sur les multiples pédales d'effets, presque autant que Moussay. Et enfin, Airelle Besson, qui chante elle aussi, mais avec sa trompette, les deux lignes parfois fusionnant, ou se complétant, dans la joie légère, dans l’exubérance sage, dans l'enchantement et la tendresse. Airelle Besson présente aussi quelques morceaux, mais elle peut à cet exercice s'améliorer.
C'est la première fois que je me rends dans cette salle, l'acoustique est excellente, la vue sur la scène parfaite, et le public, du moins pour ce soir, très enthousiaste et ovationnant. Une soirée très très plaisante, et une salle à ajouter dans ma surveillance des programmes.

airelle besson quartet au café de la danse

Berg Mahler (Philharmonie de Paris - 19 Mai 2016)

Alban Berg - Concerto pour Violon

C'est une belle version de cet "A la mémoire d'un ange" que nous offrent Isabelle Faust en soliste et Daniel Harding, pour la première fois ce soir chef de l'orchestre de Paris. Belle, soignée, fignolée, mais un brin trop parfaite et intériorisée ; il me manque le frisson d'émotion, la pointe de douleur dans les gencives ou dans l'estomac.
En bis, un extrait énigmatique, forcément énigmatique, de "Signs, games and messages" de Kurtàg.

Gustav Mahler - Symphonie n°4

Je pensais ne pas trop aimer cette symphonie, trop heureuse et gentille. Mais l'interprétation de ce soir la présente sous un jour adorable, pétillante de détails, gourmande, généreuse en soli et en arrangements orchestraux délicieux ! Un grand bonheur, dont je ne décroche pas une seconde !

mahler 4

AilleursDidier van Moere, Anaclase

Emile Parisien Quintet (Le Triton - 14 Mai 2016)

En parallèle avec son quartet et un nombre non négligeable de projets annexes, Emile Parisien lance donc un quintet, qui cherche encore son répertoire, piochant dans les compositions des différents membres. Au plaisir d'entendre le saxophoniste, toujours aussi ample, lyrique, nerveux, et spectaculaire sur scène, s'ajoute celui de retrouver Manu Codjia, pas vu depuis longtemps, et celui de découvrir le pianiste Joachim Kühn, au discours plein de brisures, de dérives et d'incises (mais ma position dans la salle me permet d'entendre la guitare bien plus aisément que le piano). En paire rythmique, il y a Mario Costa à la batterie, qui m'a fait pas mal penser à Christophe Marguet, et Simon Tailleu à la contrebasse, déjà vu avec Youn Sun Nah, et qui reste toujours aussi discret, solidement planté à l'arrière-plan.
Les morceaux choisis, d'ambiances assez diverses, dessinent un paysage en formation. A suivre, donc.

emile parisien quintet

lundi 6 juin 2016

Festival La Voix Est Libre - Les Amours Poly-gammes (Cirque Electrique - 13 Mai 2016)

Il y a du y avoir une petite défaillance de communication pour ce festival, dont je n'ai récupéré le programme qu'assez hasardeusement. D'habitude, il avait lieu au Théâtre des Bouffes du Nord, mais cette année, il se disperse entre plusieurs lieux, dont ce Cirque Electrique, qui me spamme depuis plusieurs années, mais où je n'avais jamais mis les pieds. Et la défaillance de communication s'est doublée d'une défaillance d'organisation ; indiquer 20h30 comme horaire de début, mais n'ouvrir le chapiteau qu'une heure plus tard, et continuer à y faire entrer des gens à près de 22h, ce n'est pas du tout correct. Le retard s'accentuera encore entre les deux parties, forçant des départs prématurés pour cause d'horaires de transports en communs. Enfin, je ne sais pas trop d'où sortait ce public, si c'étaient des habitués du lieu, mais entrer et sortir sans arrêt, en passant devant les artistes en train d'improviser, c'est carrément irrespectueux. J'ai l'impression que beaucoup de gens étaient là un peu par hasard, et se comportaient comme dans un festival de Rock, entrant de temps en temps voir ce qu'il se passait, avant de ressortir aller boire une bière. Tout ça donnait un cadre plutôt déplorable à la soirée.

Violaine Lochu, Marie-Suzanne de Loye, Sanja Kosonen

La soirée commence avec un duo : Marie-Suzanne de Loye à la viole de gambe, qu'elle utilise un peu comme un violoncelle, en pizz ou à l'archet, ou en bouclant au pied, de façon assez belle et sage qui m'a fait plusieurs fois penser à Vincent Courtois ; Violaine Lochu à l'accordéon, et surtout à la voix, qui part dans tous les sens, un feu d'artifice enchanteur et à tout instant surprenant, presque comme une Youn Sun Nah sans contrôle - elle commence une chanson en avalant un peu d'eau pour faire des borborygmes ... Leur duo est drôle, et Violaine Lochu est pour moi la découverte de la soirée.
Pour les accompagner, Sanja Kosonen traverse la scène sur un fil de fer, équilibriste rousse qui joue à la sorcière derrière un masque de bois, ou qui multiplie les risques sur son fil, perchée sur des talons aiguilles.

la voix est libre - les amours poly-gammes

Claudia Solal, Benjamin Moussay

Lui au piano, elle à la voix, leur duo ressemble à un récital assez classique, un peu trop tenu pour ne pas être un peu terne.
Il faut attendre que les premières protagonistes les rejoignent et les bousculent pour que Claudia Sola en particulier se lance dans des dérapages plus intéressants.

la voix est libre - les amours poly-gammes

Et c'est la fin de la première partie.

la voix est libre - les amours poly-gammes

Edmond Baudoin, Yann Tambour, Laura Perrudin

Le fil de fer est enlevé, remplacé par un dispositif permettant à Edmond Baudoin de dessiner à l'encre de chine des scènes, portraits, paysages, images oniriques, qu'une caméra, malheureusement capricieuse, projette sur grand écran.
On commence par Yann Tambour, connu sous le nom de Stranded Horse, à la guitare et à la voix. C'est pas très intéressant, sa voix est très quelconque, et les chansons sont assez plates.
Beaucoup plus enthousiasmante est la harpiste Laura Perrudin, qui comme beaucoup d'artistes ce soir, utilise les boîtiers pour enregistrer de courtes phrases musicales ou vocales et les rediffuser en boucle ; elle crée ainsi boucle après boucle  des morceaux complexes, c'est un travail technique de haute précision et parfaitement maîtrisé. Lorsque Yann Tambour se met à la kora, l'échange des sonorités devient assez captivant.

la voix est libre - les amours poly-gammes

Nosfell, Babx, Julien Lefèvre

Nosfell, à la voix et guitare, vit intensément sa musique, qu'il lance par de grands feulements dans les aigus, tout en se tordant sur scène de façon très expressive. Babx, au contraire, très sobre derrière son piano, joue dans un ambitus très étroit, des comptines cruelles. Du violoncelliste Julien Lefèvre, je n'ai pas de souvenirs.

la voix est libre - les amours poly-gammes

Et c'est la fin de la seconde partie.

la voix est libre - les amours poly-gammes

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Cloud Gate Dance Theatre de Taïwan - Rice (Théâtre de la Ville - 24 Avril 2016)

Pour sa première venue au Théâtre de la Ville, le chorégraphe Lin Hwai-min et sa troupe du Cloud gate, très connue à Taïwan, nous présentent un spectacle basé sur le cycle de la culture du riz. Si je reconnais aisément certains mouvements qui évoquent en effet le plantage du riz, d'autres sont plus mystérieux, qui font par exemple intervenir du feu et de longues perches qui claquent sur le sol. A ce travail thématique se superposent le cycle des saisons, et l'intervention des différents éléments, en particulier dans les vidéos diffusées en fond de scène pour servir de décor. Le conceptuel l'emporte finalement sur l'origine paysanne des mouvements. Et des séquences au son de la Norma de Bellini, ou de la 3ème symphonie de Mahler, s'en éloignent encore davantage.
Du coup, je trouve le tout un peu rigidifié par sa prétention, joli mais sans émotion, et en fait un tantinet rasoir.

cloud gate dance theatre

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dimanche 24 avril 2016

Arnold Schönberg - Gurre-Lieder (Philharmonie de Paris - 19 Avril 2016)

La simple vue du dispositif orchestral est déjà impressionnante. Et quand tout ce beau monde décide de monter en puissance, ça donne un charivari peu facile à maîtriser. A la tête de l'Orchestre de l'Opéra national de Paris, Philippe Jordan y parvient la plupart du temps, et si je me retrouve parfois un peu perdu dans cette masse sonore, ce doit être aussi le caractère même de cette partition. 

Cette fois, c'est dès le prélude orchestral que je trouve des échos wagnériens, plus précisément avec le fameux début de l'Or du Rhin. mais tout le duo d'amour a ensuite du mal à me passionner, malgré les efforts méritoires d'Andreas Schager et Iréne Theorin. Même le chant du ramier, par Sarah Connolly, ne m'emporte guère. Il faut attendre la seconde partie pour vraiment décoller, et ce grâce aux rôles secondaires, Jochen Schmeckenbecher en paysan et surtout Andreas Conrad en bouffon, tout en cynisme élégant et ornementations décadentes, alors que la musique grince, ricane, s'enfièvre et se déchire, et que le chœur gronde ou menace. Le "parlé-chanté" final du vétéran Franz Mazura est quant à lui plus proche d'une simple récitation.

gurre-lieder


Solistes EIC - Vents Nouveaux (Cité de la Musique - 16 Avril 2016)

Pour tout dire, je n'ai pas retenu grand-chose de ce concert ; à la fin de l'audition de la plupart des pièces, j'étais incapable de décrire ce que je venais d'entendre, ou de définir une quelconque émotion particulière. Une certaine déception, sans doute, à l'écoute des Dix Pièces pour quintette à vent de György Ligeti, dont la fin, citant Lewis Carroll, s'interroge en un "C'est tout ? C'est tout. Au revoir" qui résume assez bien cette suite alternant ensembles et solistes, mais qui ne m'a vraiment pas accroché. Du Dialodia De Bruno Maderna ou du Contour de Vito Zuraj, je n'ai aucun souvenir. Le Time and Motion Study 1 de Brian Ferneyhough est bien sur impressionnant, comme la plupart des pièces solistes de Ferneyhough, mais au-delà de l'admiration pour la performance, pas grand-chose. Et enfin, des Five Distances de Harrison Birtwistle, là non plus, aucun souvenir.
Un concert oublié sitôt consommé ...

Orchestre de Paris - Turangalîlâ-Symphonie (Philharmonie de Paris - 10 Avril 2016)

Charles Ives - The Unanswered Question

Cette fois, la trompette était dans les étages, joli effet. Mais l'ambiance est gâchée par d'incessantes quintes de toux particulièrement sonores et gênantes dans une telle oeuvre, qui me font twitter que ce soir, la question sans réponse aura été "dis, public, pourquoi tu tousses ?".

Olivier Messiaen - Turangalîlâ-Symphinie

Comme la dernière fois, le pianiste soliste est Roger Muraro, et il vole la soirée. Extraordinaires parties de piano, les chants d'oiseaux, le souffle mystique, les rythmes et les couleurs, tout y est. Les ondes Martenot, menées par Cynthia Millar, sont elles totalement intégrées dans la masse orchestrale, un ingrédient parmi les autres de l'Orchestre de Paris, mené par Paavo Järvi, qui fait admirablement respirer l'oeuvre, entre les tutti monumentaux, les rythmiques incandescentes, et les glacis luminescents.

turangalîla

Ailleurs : La souris, Palpatine, Didier van Moere

Sylvaine Hélary Spring Roll / Joëlle Léandre Tentet (Dynamo Banlieues Bleues - 7 Avril 2016)

Spring Roll - Big Apple's favor

Cette musique m'est restée en grande part inaccessible. Sylvaine Hélary mène à la flûte un quartet, accompagnée de Hugues Mayot au saxophone et clarinette, et des fidèles Antonin Rayon au piano et synthé, et Sylvain Lemêtre au vibraphone et percussion. C'est une musique très écrite, certains morceaux venant de compositeurs new-yorkais (Kris Davis, Dan Weiss, Dan Blake). Complexité des compositions, virtuosité des arrangements, avec quelques éléments d'impro tout de même, mais je reste externe à tout cela, tant pis pour moi.

Joëlle Léandre Tentet - Can You Hear Me ?

Là aussi, la musique est écrite, le disque découpe cette suite "Can You Hear Me" en 9 plages mais on pourrait sans doute distinguer de plus fines sections et sous-sections. C'est éblouissant et réjouissant d'un bout à l'autre de la performance. Je retiens en particulier le début en brouhaha de voix sur des sujets triviaux ; les moments en presque quatuor à cordes (Joëlle Léandre contrebasse ; Valentin Ceccaldi violoncelle ; Séverine Morfin alto ; Théo Ceccaldi violon) ; des solos où l'instrument débute dans des sonorités et rendus proches de la voix humaine (Christiane Bopp trombone ; Jean-Luc Cappozzo trompette) ; le solo en deux parties (des points puis des lignes) de la saxophoniste Alexandra Grimal ; les interventions imprévisibles et comme détachées de tout du guitariste Guillaume Aknine. Restent à citer Jean-Brice Godet à la clarinette et Florian Satche à la batterie et percussions.
Un ensemble exceptionnel, mené par une Joëlle Léandre impériale, qu'on sent entourée sur scène d'amour d'admiration et de respect par tous ces musiciens, certains l'accompagnant depuis longtemps et d'autres trop jeunes pour ça, Du bonheur, tout simplement.

joëlle léandre tentet

Ailleurs : dans le grand dossier Joëlle Léandre préparé par CitizenJazz, on peut déguster le portrait de chacun des musiciens de ce tentet.

Passion selon Saint Matthieu / Sir John Eliot Gardiner (Philharmonie de Paris - 25 Mars 2016)

Dans cette Matthaus Passion, j'ai été moins ému ou ébloui que dans d'autres performances du Monteverdi Choir et des English Baroque Soloists. Pourtant, Mark Padmore en évangéliste est parfait, conservant tout du long exposé un allant et une fraîcheur qui permet de rester captivé par le récit ; et Reginald Mobley, au physique de basse, est un alto très agréable. Et l'ajout du chœur d'enfants des "Pages du Centre de musique baroque de Versailles" est un vrai plus. D'autres voix, par contre, me sont à peine perceptibles, depuis ma place (assez habituelle cette année) de coté. Pareil pour l'orchestre, flûtes et hautbois sont splendides, mais le violoncelle soliste m'est dans certains chants inaudible. Cela donne une soirée en demi-teintes, où je découvre certaines nouvelles façons d'entendre cette musique de Bach, par exemple en me concentrant sur les alliages, fréquents en deuxième partie, entre une voix et un instrument soliste, mais où je ne suis pas vraiment embarqué dans l'émotion.

la saint matthieu

Ailleurs ; Zvezdo

dimanche 10 avril 2016

Les Liaisons Dangereuses / Christine Letailleur (Théâtre de la Ville - 17 Mars 2016)

Pas grand-chose à dire de ce ratage. Dominique Blanc en Mme de Merteuil et Vincent Perez en Valmont mènent la danse, mais sans jamais vraiment convaincre de leur pouvoir de séduction. Les scènes clé déçoivent. Cécile de Volanges est jouée comme une idiote, et Danceny ne vaut guère mieux. L'humour est lourd, voire déplacé, avec l'homme de main de Valmont. Quand la tension s’accroît, après que Merteuil ait demandé à Valmont de rompre avec Tourvel, le mieux qu'ait trouvé la mise en scène est de baisser la lumière ; oui, ok, ça s'assombrit. Une telle platitude est affligeante;
En fait, les deux seuls intérêts de cette pièce sont de rappeler la chronologie des événements, et de donner envie de revoir le film de Stephen Frears.

Marie Chouinard / Le Sacre du printemps, Henri Michaux : Mouvements (Maison des Arts de Créteil - 11 Mars 2016)

Le Sacre du Printemps

Cette pièce de 1993, la première que Marie Chouinard ait créée à partir d'une oeuvre musicale, est emblématique de son art chorégraphique. La première image est une sorte de signature : dans un cercle de lumière apparaît une figure, qui, plus qu'androgyne, est ambiguë. Est-ce un homme, une femme, une ou deux personnes ? Cet entre-deux se généralisera encore plus au long de la pièce, entre humain et animal, entre réel et fantasme. Les créatures, torse nus, certaines ornées d'appendices, cornes, griffes, épines, sont d'abord isolées, chacune dans son rond, et s'agite selon un pattern répété, dans une juxtaposition qui suit la partition musicale. Puis des rencontres ont lieu, confrontation, séduction, ou simplement cohabitation. L'énergie qui se dégage n'est pas que sexuelle, elle est vitale ; et se dessine ce mélange si particulier de Chouinard, où l'abstraction se heurte à l'humour pour tracer des lignes de vie.

Henri Michaux : Mouvements

Cette pièce de 2011 se base sur le livre "Mouvements" de Henri Michaux, qui consiste en 64 pages de dessins à l'encre de chine, et un poème. Les dessins, qui sont projetés sur grand écran en fond de scène, agrègent des petites formes les unes à coté des autres, que Chouinard interprète comme des silhouettes humaines, et traduit en poses chorégraphiques. C'est vif, drôle, surprenant, puis vient rapidement la question : comment tenir pendant 64 pages sans lasser ? Pour cela, elle prend de l'ampleur, après une seule danseuse interviennent plusieurs, puis toute la troupe, qui au lieu de transcrire chaque gribouillis successif se charge d'une page entière, Au milieu de la pièce, la danseuse principale Carol Prieur se glisse sous le tapis de sol, et recite, avec force conviction et emportement, le poème de Michaux. Puis continue de réciter, tout en dansant ! Extraordinaire performance. C'est ensuite une longue montée en puissance, vers une explosion finale en stroboscopie.
Comme toujours avec Marie Chouinard, je ressors de la salle gonflé d'énergie positive !

mouvements

Ailleurs : Danseaveclaplume

dimanche 20 mars 2016

Carvalho Gat Guerin Forsythe (Théâtre de la Ville - 26 Février 2016)

Tânia Carvalho - Xylographie

18 danseurs et danseuses du Ballet de l'Opéra de Lyon sont divisés en 3 groupes, chacun d'une couleur. Ils créent des lignes, des ensembles, passant d'une disposition à la suivante, prenant la pose, imitant les décompostions de mouvements à la Muybridge. C'est joli, soit, mais aussi assez prétentieux et vide.

Emmanuel Gat - Sunshine

Sur une musique qui semble tirée d'une répétition d'orchestre préparant du Haendel, une douzaine de danseurs et danseuses s'agitent tranquillement. Le livret laisse entendre que c'est, au moins en partie, improvisé; Pourquoi pas. Ca rappelle vaguement du Cunningham/Cage, mais en moins réussi.

Lucy Guerin - Black Box

Un beau dispositif théâtral que cette grande boite qui descend occuper le centre de la scène plongée alors dans le noir puis se relève pour laisser voir une danseuse en solo, un couple, ou toute une troupe, qui rapidement font leur numéro avant de revenir se nicher sous la boite qui les escamote. C'est varié, amusant, l'effet de surprise à chaque révélation ne s'épuise pas, c'est fluide, c'est joli, c'est charmant, c'est la découverte de la soirée.

William Forsythe - One Flat Thing, Reproduced

Les tables métalliques, les grands mouvements de marée, les parcours individuels, la tonicité, l'humour, la musique de Thom Willems, bien sûr ça marche à fond, cette pièce est un chef d'oeuvre qui une fois achevée donne aussitôt envie de la revoir, pour en scruter d'autres détails, depuis un autre endroit de la salle.

L'ordre des pièces était particulièrement bien choisi ce soir, elles étaient de mieux en mieux !

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Solistes EIC - Timbres en fusion (Cité de la Musique - 19 Février 2016)

Alfred Schnittke - Hymnus 1

Dans cette pièce pour violoncelle, harpe et timbales, c'est la partie pour timbales qui est la plus étonnante, qui joue énormément sur les pédales pour des sons "mous", comme creusés. Tout est très lent, quand soudain éclate une mélodie de violoncelle comme une protestation, avant de retomber dans la lenteur initiale, quoique la lumière ait changée, à peine plus vive.

Nina Senk - Reflections

Pour trompette et piano. Ca commence avec beaucoup de souffle, et de graves, puis un dialogue s'établit. La fin reboucle. Le livret explique que la trompette joue par moments dans la caisse de résonance du piano ; présenter ça comme une nouveauté ou une audace, faut oser ...

Yoshihisa Taïra - Monodrame IV

Pièce solo pour vibraphone. Pas vraiment marquant ...

Rebecca Saunders - Behind the Velvet Curtain

On retombe bien ici sur le titre du concert : fusion des timbres. Pour trompette, harpe, piano et violoncelle, c'est la première pièce composée par Saunders, et on y trouve bien son univers, avec des nappes bruitistes, que déchirent des explosions soudaines, dans une tension dont l'impact est plus instinctif qu'intellectuel. Musique sensorielle, concrète, pleine de griffures de silences et de stridences. Splendide.

William Blank - Flow

Pour trompette, hautbois, harpe, violon et violoncelle. Aucun souvenir (et aucune vidéo sur Youtube, contrairement à toutes les œuvres précédentes !).

timbres en fusion


samedi 27 février 2016

Traîtres mots (Cité de la Musique - 9 Février 2015)

Felipe Lara - Fringes

Cette oeuvre a été écrite spécialement pour célébrer les qualités spatiales de la grande salle de la Cité de la Musique, d'où spatialisation de musiciens tout autour du public. Je ne me souviens plus de grand-chose : un travail entre bruit et son, note et matière, son vocal et instrumental ? Des moments intéressants, je crois, mais pas très abouti, avec pas mal de rebut.

François-Bernard Mâche - Kassandra

C'est une pièce de 1977, pour ensemble instrumental, et sons enregistrés. Les séquences mêlent les instruments, et des sons naturels, d'eau, de feu, d'insectes, de voix étrangères, parfois peu identifiables. Les mélanges sont souvent surprenants, la trajectoire est imprévisible, la résolution en fusion de la dernière séquence est très réussie.

Ivan Fedele - Words and Music

J'avais entendu la version de Feldman de cette pièce de Beckett, voici la version de Fedele. La musique m'a semblé assez accessible, et agréable à écouter; Mais ce n'était pas une grande soirée pour moi, la majorité du concert m'est un peu passé à coté, cette pièce y comprise. Du coup, je n'ai pas grand-chose à en dire.

words and music

Autour de Gruppen (Cité de la Musique - 30 Janvier 2016)

Jonathan Harvey - ... towards a pure land

Pour ce voyage mystique du monde de souffrance vers la Terre Pure, "aspiration suprême du Bouddhisme", on commence dans le vent, le liquide, le presque rien, puis ça gonfle, ça déborde en envolées pleines d'irisations percussives qui parcourent l'orchestre du Conservatoire, qu'accompagnent quelques solistes de l'EIC. La fin du voyage se fait dans une brume évanescente et un temps peut-être un peu trop suspendu. Le tout est plutôt fascinant.

Bernd Alois Zimmermann - Antiphonen

C'est une sorte de concerto pour alto et petit orchestre, en cinq parties enchaînées. Je comprends rarement grand-chose à la musique de Zimmermann, et ce soir n'est pas une exception. La disposition spéciale des musiciens sur la scène ne change pas grand-chose au résultat que je perçois depuis le balcon de coté. Les choses se passent sans trop d'encombre jusqu'à l'antiphonie 4, où les musiciens récitent des textes dans diverses langues, dans un empilement passablement prétentieux.

Karlheinz Stockhausen - Gruppen

Grand moment de ce week-end consacré à Stockhausen, cette pièce fort célèbre, écrite pour trois orchestres. Au chef d'orchestre Matthias Pintscher s'ajoutent Bruno Mantovani et Paul Fitzsimon. En fait, le résultat me fait beaucoup penser à du Xenakis, qui lui aussi jouera souvent de la spatialisation en éparpillant les musiciens autour du public de diverses manières, mais sera souvent plus spectaculaire. Là encore, il est possible que mon emplacement, non au centre de la salle, mais déporté au-dessus de l'un des orchestres latéraux, influe sur mes impressions, mais je n'ai guère ressenti le jeu des questions-réponses entre les groupes; Le résultat final n'est pas désagréable, mais pas très marquant non plus. Une certaine déception, du coup, par rapport à une oeuvre dont j'ai si souvent entendu parler.

après gruppen

Ailleurs : Michèle Tosi, Zvezdo.

vendredi 5 février 2016

Orchestre National d’Ile de France - French Touch (Philharmonie de Paris - 17 Janvier 2016)

Bernard Cavanna + NoMadMusic

En préambule au concert, un prix est remis à une internaute pour sa recomposition d'une pièce de Bernard Cavanna, que le site NoMadMusic permettait de réagencer à sa guise; La pièce, pour orchestre de chambre atypique, est donnée dans sa version remixée, puis originelle. Tout ça sonne anecdotique.

Claude Debussy - Prélude à l'après-midi d'un faune

Tout ce concert sera très fortement déterminé par ma position : orchestre, plein centre, deuxième rang. Donc au pied du chef d'orchestre Shao-Chia Lü. Le "Faune" n'y survit pas. J'entends quelques notes de harpe totalement à ma gauche, un mur de violons et altos devant moi, des échos de vents au loin. Aucun mélange. Impossible d'entendre la pièce dans ses conditions, elle est livrée en kit incomplet à mes oreilles. J'en suis réduit à attendre que ça se termine.

Henri Dutilleux - Tout un monde lointain

L'avantage, c'est que je suis aussi au pied de Xavier Phillips, et profite pleinement de chacune de ses notes, de son intensité, de sa passion même, douceur ici, violence là, son interprétation est profondément vécue, et magnifique. L'ONDIF lui fournit un bel écrin. En bis, il joue, toujours aussi intensément impliqué, les belles et plus mystérieuses "Trois Strophes sur le nom de Sacher".

tout un monde lointain

Maurice Ravel - Pavane pour une infante défunte

Ça marche beaucoup mieux que le "Faune" ! Sans doute parce que, étant une transcription pour orchestre d'une pièce pour piano, la mélodie en reste un élément principal. Et là, je l'entends bien.

Claude Debussy - La Mer

Devant moi, une enfant, remarquablement sage, quand son père lui indique le titre, se love contre sa mère, qui doit lui expliquer que non, c'est de l'océan qu'il s'agit. A part ça, pas grand-chose à dire.

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vendredi 29 janvier 2016

Jusqu'au bout de l'impro (CNSMDP - 16 Janvier 2016)

C'est à Anne Montaron qu'on doit cette nuit d'improvisations au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. J'y suis allé en me demandant combien de temps j'allais tenir, finalement j'aurais bien continué plus longtemps ! La diversité des styles musicaux présentés, et l'alternance régulière obligeant à changer de salle toutes les heures, ont bien réussi à me tenir éveillé, j'en étais tout étonné.
Seuls les premiers concerts étaient si pleins que du monde est resté à la porte, si bien que je n'ai pu assister aux improvisations médiévales, ni à l'ensemble de contrebasses. Les rangs sont ensuite restés très correctement remplis, beau succès d'audience, très jeune, visiblement beaucoup d’élèves et d'accointances.
Je vais me contenter d'un recueil d'impressions.

Agréable entrée en matière avec un Quintette Be Bop, qui improvise sagement, en collant à la grille, rien de révolutionnaire. Bien plus intéressante est l'improvisation modale qui suit, qui propose l'alap et le teentala du raga Puriya Danashree, à la flûte, par Samuel Bricault, accompagné à la guimbarde, tablas, et tampura, celle-ci jouée par Gabriel Gosse, qui interviendra plusieurs fois dans la nuit, un nom à suivre. Très belle interprétation, calmement envoûtante, je suis sous le charme.

jusqu'au bout de l'impro

Après une longue pause forcée par le trop-plein du public dans la deuxième salle, nous retournons au même Espace Fleuret, pour une rencontre entre musiciens et danseurs (le M et le D de CNSMDP). Il y a deux groupes de musiciens : des élèves de la classe d'accompagnement chorégraphique, aux allants les plus classiques, et d'autres de la classe d'improvisation générative, plus expérimentaux. C'est une demi-heure passionnante, où on voit les personnalités, ces deux-là qui ne peuvent se retenir de danser avant même l'arrivée des musiciens, celle-ci qui brille de suite en grands mouvements, celui-ci qui cherche sa place, ceux-là qui se regroupent et s'amusent avec les musiciens, ceux qui s'ignorent, ceux qui s'attirent, ceux qui se la jouent un peu trop, ceux qui sont soudain saisi par un court moment de grâce. Et puis se pose une question essentielle qui se répétera au cours de la nuit : comment finir une improvisation ? Les temps impartis sont courts pour ces élèves ivres de scène. Anne Montaron fait de grands signes pour couper, ils finissent par la voir et s'arrêtent dans un certain flottement.

jusqu'au bout de l'impro

jusqu'au bout de l'impro

Cette fois-ci, j'accès à la deuxième salle, garnie d'un magnifique orgue. On commence par des portraits de spectateurs, où des pianistes posent quelques questions à des volontaires pour ensuite improviser à partir de ces indices. C'est malin, souvent drôle, avec certains mots, des lieux, des couleurs, des sentiments, qu'on peut reconnaître dans l'improvisation, souvent composée de plusieurs thèmes successifs ensuite mêlés. Réussir à arrêter les pianistes est la partie la plus compliquée ...
Suit une improvisation à l'orgue, en fait en trio, orgue, piano, orgue Hammond, mais qui ne m'accroche guère, je n'ai pas l'impression d'un grand échange entre les musiciens.

jusqu'au bout de l'impro

Retour à l'Espace Maurice Fleuret pour du Big Band autour de John Kirby. François Théberge présente les pièces, et les dirige, très dansant. Les arrangements sont écrits pas les élèves ; c'est entraînant, d'une excellente facture, sans trop de solos, l'importance est plutôt dans l'écriture orchestrale. Bref, c'est très plaisant.

jusqu'au bout de l'impro

jusqu'au bout de l'impro

S'ensuit une improvisation générative autour de Ludwig Van de Mauricio Kagel. C'est du Sound Painting, avec pas mal d'éléments théâtraux, de grands rires collectifs, des gags musicaux, mais aussi de la bonne musique avec son lot d'émotions. Du bon travail.

jusqu'au bout de l'impro

jusqu'au bout de l'impro

Du séjour suivant en salle d'orgue, je ne garde guère de souvenirs; Une adaptation pour Quartet de Jazz de la sonate pour piano de Henri Dutilleux assez crispée et sans grand charme. Des improvisations Jazz et musique ancienne où brilla vaillamment, malgré l'heure tardive, ou très matinale, la soprano Marie Perbost.

Et donc, la soirée se termine par des improvisations Jazz. D'abord deux guitaristes en solo, Aurélien Hall, en acoustique, et Gabriel Gosse, en électrique et pédales d'effet, excellents l'un et l'autre, dans des styles très différents.

jusqu'au bout de l'impro

jusqu'au bout de l'impro

Et enfin, Médéric Collignon mène en Sound Painting une dizaine d'élèves qui forment un effectif assez disparate (deux pianos, un accordéon, trois flûtes, deux violons, deux violoncelles, et une clarinette). Il embraie ensuite sur "Red Clay" de Freddy Hubbard, où il se lance en beatbox et scat, pour un final haut en couleurs et en énergie.

jusqu'au bout de l'impro

jusqu'au bout de l'impro

Et ainsi boostés, après un petit dèj un brin décevant, les biscuits apéros à minuit étaient meilleurs, nous partons dans le matin à peine blême, voir si Paris s'éveille ...

Ailleurs : plus de photos ici, et réécoute de la Nuit sur France Musique