lundi 10 avril 2006

Andrew Hill (New Morning - 8 Avril 2006)

J'ai déjà évoqué Andrew Hill lors d'un concert de Ahmad Jamal : inconnu du grand public, son univers singulier force le respect de ses pairs. De retour dans l'actualité du Jazz suite à l'album Time Lines paru dernièrement chez Blue Note, il se présente ce soir avec le même quintet.
Penché sur sa contrebasse et tounant, dansant, ondulant autour d'elle, John Hebert propose une sorte de solo continu, ne se contentant que rarement de donner le tempo, mais variant les lignes et les rythmes, dans une inventivité joyeuse et élégante.
Il ne faut pas compter sur Eric McPherson pour rétablir une base rythmique solide. De sa batterie, il propose un brouillard de percussion, une crème fouettée, un mille-feuilles dans lequel on se perd facilement si on y plonge pour tenter d'analyser. Restons donc à la surface, chatoyante, multiple, et comme illusionniste.
Pas facile de se placer au-dessus d'un pareil canevas. Au saxophone et à la clarinette, Greg Tardy semble en même temps intimidé et désireux de trouver des voies originales, ce qui donne des soli qui ont parfois du mal à démarrer, puis s'enflamment soudain.
Charles Tolliver est beacoup plus dans son élément, plus agé, et fréquentant Hill depuis les années 60. Il brille du coup avec aisance, déjouant les pièges, et offre le visage le plus accessible à cette musique.
Au piano, enfin, Andrew Hill. Sa désinvolture parfois le place en droite ligne de Monk, plaquant des suites d'accords juste à coté du tempo, ajoutant des notes incongrues comme au hasard, brisant sans cesse des amorces de mélodies ou de discours harmoniques, en constante exploration, utilisant la scène en petit laboratoire. Quand le morceau le réclame, il sait bien sur calmer le jeu, et peint des moments de lyrisme abstrait, suscitant des émotions paradoxales proches de celles d'Ornette Coleman.
Les deux sets proposent principalement (exclusivement ?) des morceaux de leur album "Time Lines", dans des versions longues où le pianiste s'offre plusieurs soli ; mais fouiller ainsi chaque pièce dans ses recoins en révèle les particularismes, et alors que j'avais trouvé l'album un peu trop linéaire, comme si tous les morceaux se ressemblaient, ce n'est pas du tout le cas sur scène.
Enfin, à l'entracte, j'ai pu dire bonsoir à Samizdjazz en pleine discussion, mais nous avons pu vérifier que l'absence de bière la dernière fois n'était due qu'à une injonction de Yusef Lateef.

Mise à jour : Dans le Pot-Pourri, un morceau du début de Andrew Hill, déjà chez Blue Note, un extrait Live avec un sextet où brillaient déjà Tardy et Hebert, et enfin un morceau du fameux dernier album.

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